Les scandales liés aux conflits d’intérêts ne se limitent pas aux gouvernements nationaux mais sont aussi au cœur de l’Union européenne. Alors que les affaires des vacances de Michèle Alliot-Marie et de François Fillon aux frais des dictateurs Ben Ali et Hosni avaient ébranlé le gouvernement français en début d’année, la Commission européenne s’apprêtait à renforcer les règles visant à éviter les conflits d’intérêts. C’est dans cette optique que le président de la Commission, José Manuel Barosso avait présenté le 10 février 2011 aux groupes politiques du Parlement un projet de révision du code de conduite de son institution. Suite à plusieurs affaires controversées et à des critiques de plus en plus pressantes, la Commission s’était donc engagée à appliquer des règles déontologiques plus strictes pour ces membres et anciens membres telles que l’interdiction formelle des commissaires de voyager aux frais de gouvernements ou d’entreprises ainsi que la mise à jour annuelle de leur déclaration d’intérêts. En substance, il était également prévu que les commissaires seraient invités à ne pas accepter d’invitation dépassant les normes de "l’usage diplomatique" et "de la courtoisie".

Il n’a pas fallu longtemps pour que le Parlement prenne exemple sur la Commission. En effet, il a adopté à l’unanimité jeudi 1er décembre lors de la session plénière, un code de conduite dont l’objectif est de lutter contre la corruption et les conflits d’intérêts. Il s’agit là d’une noble initiative mais elle vient avant tout en réaction à un scandale qui avait éclaté en mars dernier au sein du Parlement. Trois députés avaient alors été pris en flagrant délit de corruption. Ils se disaient prêts à « vendre leurs services » pour des sommes allant jusqu’à 100.000 euros, à des journalistes de l’hebdomadaire britannique The Sunday Times se prétendant lobbyistes. Ils avaient également accepté des pots-de-vin pour modifier le sens de leur vote sur certains textes de loi. Suite à cette affaire, le Parlement s’était dès le mois d’avril engagé à accroître la transparence des députés. Sa crédibilité de la seule institution européenne démocratiquement élue – avait sérieusement été mise à mal. Début juillet, la conférence des présidents (composée du président du Parlement européen et des dirigeants des groupes politiques) avait approuvé à l’unanimité un nouveau code de conduite pour les députés européens. Le Président du Parlement, Jerzy Buzek avait alors déclaré : "Nous nous armons d'un bouclier contre tout comportement contraire à l'éthique. Le travail a été effectué en un temps record, seulement 10 semaines. Nous disposons maintenant d'une proposition sur le tout premier code de conduite du Parlement européen. Cette proposition impose des normes strictes au Parlement".

Il s’agit là du premier code de cette sorte. Jusqu’à présent, il existait simplement une série de règles dispersées dans le règlement interne du Parlement. Après plusieurs mois de débats dus aux différences culturelles concernant l’influence politique, le nouveau code de conduite remanié a enfin vu le jour. Voici les principales mesures qui ont été prises :

Les députés se voient contraints de déclarer leurs activités professionnelles ainsi que toute autre fonction ou activité rémunérée pendant les trois années ayant précédé l’élection, tout comme les indemnités perçues pour l’exercice d’un mandat au sein d’un autre parlement. De plus, le nouveau code tente de cibler les conflits d’intérêts et punit les députés qui déposent des amendements influençant les lois au nom de lobbies de l’industrie ou des entreprises et ce afin qu’ils ne soient pas en mesure d’occuper des postes importants comme président de commission ou rapporteur. Toutefois, ils peuvent toujours accepter en cadeau des marques d’hospitalité (chambres d’hôtels, vols) à condition qu’il ne s’agisse pas là d’une tentative d’influencer, voire même de corrompre les députés. Les députés coupables de lobbying perdront leurs avantages en quittant le Parlement européen.

Le code de conduite adopté par 619 voix, 2 contre et 6 abstentions prévoit la création d’un comité consultatif chargé de donner des lignes directrices aux députés et de conseiller le Président sur les mesures à prendre en cas de violation du code. Reste donc à savoir si le code sera correctement appliqué et ce afin de restaurer la crédibilité du Parlement. Les nouvelles dispositions entreront en vigueur au 1er janvier 2012. La mise en œuvre d’une procédure de contrôle, sera quant à elle, discutée prochainement par le Bureau du Parlement.

Morwenna Joubin, Coralie Ledoux

Sources :

  • http://www.presseurop.eu/fr/content/news-brief/1237141-un-code-de-conduite-pour-les-deputes
  • http://www.europarl.europa.eu/news/fr/headlines/content/20111129FCS32711/10/html/Le-nouveau-code-de-conduite-pour-les-eurod%C3%A9put%C3%A9s-est-approuv%C3%A9
  • http://www.touteleurope.eu/fr/organisation/institutions/commission-europeenne-et-commissaires/actualite/actualite-vue-detaillee/afficher/fiche/5041/t/44288/from/2836/breve/nouveau-code-de-conduite-europeen-les-commissaires-europeens-ont-interet-a-faire-attention.html?cHash=2c7c0e8bab
  • http://www.liberation.fr/monde/01012326597-trois-deputes-europeens-prets-a-vendre-leurs-services