Depuis la prise de fonctions en novembre 2014 de la Commission que préside Jean-Claude Juncker, une année d’actualités européennes toujours plus critiques s’est écoulée. Si bien que pour entamer son discours, l’ancien premier ministre du Luxembourg a choisit d’évoquer la « polycrise » que traverse actuellement l’Europe. Il résume de la manière suivante : « l’Europe est confrontée à une conjonction de crises multiples, complexes, multistratificationnelles, venant de l'extérieur ou de l'intérieur de l'Union européenne, et qui surviennent toutes en même temps. » (1).

En effet, les mauvaises nouvelles s’accumulent pour Bruxelles qui doit faire face simultanément à la crise migratoire et au terrorisme qui remettent en cause l’avenir de l’espace Schengen, à la crise grecque, sans oublier la question du « Brexit » qui apparait aujourd’hui plus forte que jamais. De fait, l’Europe a bien du mal à répondre à tous ces défis. Pire, l’annus horribilis qu’elle a connu en 2015 risque fortement de se poursuivre en 2016, dont le début n’encourage guère à l’optimisme.

La Commission fait son travail, la faute revient aux états

Selon lui, la situation d’urgence dans laquelle se trouve l’Europe aurait pu être meilleure, la faute incomberait en partie aux états membres qui n’appliqueraient pas les conclusions données par la Commission européenne. Ainsi dans son discours, il pointe du doigt le manque d’action de ces états qui sont d’avantages enclins à critiquer l’Union européenne et il les invite à « se regarder dans le miroir et constater que oui, "Bruxelles" c'est aussi eux; c'est aussi les États membres, c'est aussi les gouvernements de ceux-ci. »(1).

En parallèle, il continue d’affirmer que la Commission est loin d’être aussi « insuffisamment active » que certains ont pu le dire. Pourtant, le plan d’investissement Juncker lancé il y a tout juste un an et qu’il prend ici pour défendre l’Institution bruxelloise connait des résultats assez mitigés. (2)

Des formules choc teintées de pessimisme

Pour manifester son point de vue sur 2016, Jean-Claude Juncker utilise dans son discours des formules choc teintées d’un pessimisme qui symbolise bien son début d’année. Jean Quatremer, correspondant de libération à Bruxelles et spécialiste des politiques européennes s’inquiète d’ailleurs sur son blog, Coulisses de Bruxelles (3), qu’un des principaux responsables de l’Union européenne reprenne au cours de ses différentes sorties médiatiques un tel diagnostique pour l’année 2016, qui marquerait « la fin de l’idée européenne ».

Un diagnostique que l’on retrouve lorsque Juncker annonce que sans une gestion commune des frontières, « Schengen n'y survivra pas ». Depuis quelques semaines il multiplie ce genre de formules pessimistes, volontairement provocatrices qui apparaissent comme son principal moyen pour faire réagir les états membres et l’opinion publique européenne. Le président de la Commission arbore un fatalisme de circonstances à propos de l’année à venir. Un fatalisme sur les défis que doit désormais relever l’Union européenne et qu’il a déjà déjà clairement exprimé. Ainsi, le 15 janvier il avait déclaré  « Je ne me fais pas sur l’année qui pointe trop d’illusions », une formule déjà utilisée le 18 décembre dernier, il s’était alors déclaré « sans illusion » pour 2016 (4) au moment de faire le bilan de l’année passée.

Il reste désormais quatre années à cette Commission européenne « de la dernière chance », selon des mots choisis par Jean-Claude Juncker lors de son investiture en 2014, pour inverser la tendance actuelle et redonner confiance dans le projet européen. Une tâche immense que le pessimisme n’aidera pas.

Sources :

(1) : http://europa.eu/rapid/press-release_SPEECH-16-112_en.htm

(2) : https://www.rtbf.be/info/economie/detail_plan-d-investissement-juncker-encore-loin-des-315-milliards-d-euros-esperes?id=9189769

(3) : http://bruxelles.blogs.liberation.fr/2016/01/18/le-pessimisme-de-lintelligence-de-jean-claude-juncker/

(4) : http://www.lesoir.be/1073025/article/actualite/fil-info/fil-info-monde/2015-12-18/jean-claude-juncker-sans-illusion-pour-l-annee-2016