Il faut cependant nuancer ce propos, la popularité du parti Pis, au pouvoir, ne faiblit pas malgré ces nouvelles lois décriées par l’opposition. Le parti reste en tête des sondages, avec environ 35% d’opinions favorables, devançant largement ses concurrents.


Cette crise pose une nouvelle problématique à l’Union Européenne. Le respect des fondements démocratiques sont une condition sine qua non pour l’entrée dans l’Union. Mais quels sont ses pouvoirs lorsqu’un pays faisant partie de l’Union amorce une dérive autoritaire ? Comment lutter contre les extrémismes et le populisme au sein même de l’Union alors que l’on pensait cette lutte maintenant terminée à l’intérieur des frontières de l’UE ? Alors que l’Europe s’est justement construite dans la peur de ces extrémismes, populismes, et du rejet de l’autre ?


Face à ces mesures, le premier à réagir a été Donald Tusk, Président du Conseil européen et ancien Premier Ministre polonais. Il a appelé le pouvoir à respecter « la population, les principes et les valeurs constitutionnelles ».


La seconde étape est intervenue le 11 janvier 2017, avec le lancement d’une procédure formelle de surveillance du respect de l’Etat de droit dans le pays. C’est la première fois que Bruxelles met en place une telle procédure. Grace à un mécanisme créé en 2014, mais jamais utilisé jusqu’à présent, lorsqu’il y a un risque d’atteinte à l’Etat de droit dans un pays de l’Union, la Commission européenne peut mettre en place une procédure de surveillance afin d'empêcher toute escalade dans les menaces systémiques envers l'Etat de droit.

Dans les faits cela se traduit par la mise en place d’un « dialogue » en trois étapes avec l’Etat. Il y a tout d’abord une évaluation suivie d'un avis, puis une recommandation pour résoudre les problèmes constatés, et enfin le suivi de sa mise en œuvre.

Pour l’instant, il s’agit de discutions entre le vice-président de la Commission, Frans Timmermans, et le gouvernement polonais, première étape de l’évaluation. La Commission a ainsi envoyé mercredi une lettre au gouvernement polonais afin d’obtenir des renseignements sur la situation et les politiques controversés, et se forger une opinion. Si Bruxelles confirme qu’il y a bien une menace systématique envers l'Etat de droit avec ces politiques, le Commission émettra une recommandation qui aura valeur d'avertissement politique.

Cependant, si ces recommandations ne sont pas suivies, le mécanisme ne semble pas contraignant. Des sanctions ne sont envisagées qu'en dernier recours, après des mois de procédure. De plus, pour l’instant Bruxelles n’a pas évoqué ce possible recours aux sanctions, pour ne pas braquer le gouvernement polonais, déjà ouvertement eurosceptique. Le processus mis en place vise le règlement des dérives par le dialogue. Cependant, cela reste un message politiquement fort envoyé par la Commission au gouvernement.


La mise en place de cette surveillance semble aussi être une mise en garde pour les autres pays européens. En effet, le cas de la Pologne n’est pas un cas isolé, une dérive populiste est à l’œuvre en ce moment dans plusieurs pays européens, comme la Hongrie, la Grèce ou l’Autriche. De plus, l’élection de Trump, le Brexit ou encore la possible élection de Marine Le Pen en France font craindre un effet de contagion encore plus large en Europe. Un rapport d’Human Rights Watch du 12 janvier 2017 lance d’ailleurs une mise en garde contre la montée de "l'intolérance" menaçant les démocraties occidentales et les droits de l'homme, à l’œuvre en Europe actuellement.


Dans son rapport, l’ONG estime qu’une « réaction populaire forte, en utilisant tous les moyens disponibles, est la meilleure défense ». En témoignent les grandes manifestations contre le projet de loi anti-avortement en octobre dernier en Pologne, grâce auxquelles le texte a été rejeté à une grande majorité par le Parlement.


Sources :

http://www.lexpress.fr/actualites/1/monde/pologne-la-crise-politique-se-poursuit-le-parlement-toujours-paralyse_1868089.html

http://www.lesechos.fr/13/01/2016/lesechos.fr/021616982429_loi-sur-la-justice-et-les-medias---bruxelles-lance-une-procedure-inedite-contre-varsovie.htm

http://www.europe1.fr/international/pourquoi-bruxelles-menace-la-pologne-2649779

http://www.lexpress.fr/actualites/1/monde/la-montee-des-populismes-menace-les-democraties-previent-human-rights-watch_1868459.html

https://www.hrw.org/fr/news/2017/01/12/rapport-mondial-2017-les-demagogues-menacent-les-droits-humains