Tout a commencé par l’affaire d’une famille syrienne persécutée qui avait déposé une demande de visa humanitaire auprès d’une ambassade belge et qui s’est vu refusé celle-ci. La Cour de justice de l’Union européenne (CJUE) avait donc été saisie pour juger cette affaire mais face à la pression des Etats membres et de la Commission européenne avait déclaré ne pas être compétente pour trancher. De plus, le Conseil des ministres et la Commission ont refusé à plusieurs reprises d’entreprendre des négociations notamment en 2017 où l’équipe de négociation du Parlement européen fût contrainte de retirer les amendements déposés. Il est important de clarifier qu’une demande de visa de court-séjour relève d’une compétence européenne et que ce visa ne peut être utilisé pour faire une demande d’asile une fois sur place. C’est cette procédure qu’a voulu faciliter la commission des libertés afin que les demandeurs d’asiles accèdent à l’Union européenne par voie légale. En effet, des estimations ont montré que 90% des personnes qui ont reçu une protection internationale sont arrivés sur le territoire de manière illégale, le périple entrepris par ces personnes les exposent souvent à des violences, abus et même trafic. Cette situation touche particulièrement les femmes qui sont souvent exploitées sexuellement et économiquement sur les routes migratoires de l’Union et ce pour leur survie.

juan_lopez__2_.jpg Le rapporteur de la proposition, Juan Fernando Lopez Aguilar

Lors de la session plénière de Strasbourg qui s’est tenu en novembre, la commission des libertés a donc soumis au vote une proposition qui appelle la Commission européenne à déposer une législation permettant aux personnes en quête d’une protection internationale de demander premièrement un visa humanitaire dans une ambassade ou un consulat européen. Le visa permettra ensuite d’accéder au territoire d’un Etat membre pendant une durée limitée afin de pouvoir faire une demande d’asile. Grâce à cette procédure, les demandeurs n’auront plus à risquer leurs vies pour arriver sur le sol de l’Union européenne ; on évalue la perte humaine en Méditerranée depuis les années 2000 à au moins 30 000 personnes. Cependant, lors de la session de vote du 13 novembre, le texte n’a pas été adopté. La cause ? La majorité qualifiée n’était pas présente au sein de l’hémicycle car certains députés ont retirés leurs cartes de vote trop tôt, afin d’aller en pause, ce qui a empêché leurs votes d’être pris en compte. Malgré les nombreuses demandes, notamment celles du rapporteur Juan Fernando LOPEZ AGUILAR, et des députés, le président du Parlement européen, Antonio TAJANI, a refusé de reporter le vote au lendemain. Cette situation tristement célèbre a été relayée sur les réseaux sociaux et a choqué bon nombres de citoyens européens. Fort heureusement, la proposition sera certainement présentée de nouveau lors de la session plénière qui se déroule du 10 au 14 décembre. Espérons que cette fois-ci, cette proposition puisse faire avancer la législation et permettre à l’Union européenne de respecter ses valeurs fondamentales que sont le respect de la dignité humaine et ceux des droits de l’Homme.

Sources :

  • Proposition de résolution sur les visas humanitaires du 28/03/2018 :

http://www.europarl.europa.eu/sides/getDoc.do?pubRef=-//EP//TEXT+TA+P8-TA-2016-0102+0+DOC+XML+V0//FR

  • Vidéo du débat sur le vote des visas humanitaires :

http://www.europarl.europa.eu/plenary/FR/vod.html?mode=unit&vodLanguage=FR&startTime=20181114-13:33:08-910#

  • Résolution du Parlement européen du 12/04/2016 sur la situation en Méditerranée :

http://www.europarl.europa.eu/sides/getDoc.do?type=REPORT&reference=A8-2018-0328&language=FR#title3

  • Article sur l’affaire de la famille syrienne :

https://solidaire.org/articles/visa-humanitaire-comment-l-union-europeenne-mis-la-justice-sous-pression