Suite à la révélation d’un vaste système d’évasion fiscale au Luxembourg le 6 novembre dernier, le Président de la toute nouvelle Commission : Jean-Claude Juncker s’est vu déstabilisé. Toutefois, il a promis que la Commission allait prendre des mesures fortes afin de lutter contre l’évasion fiscale. Mais ces promesses n’ont pas convaincu tout le monde. En effet, la Gauche radicale a déclaré avoir lancé un appel auprès des eurodéputés des autres familles politiques afin de voter une motion de censure contre la nouvelle Commission européenne.

C’est mardi 18 novembre 2014 que cette motion de censure est parvenue jusqu’à l’administration du Parlement européen, après avoir récolté 77 signatures du groupe de la gauche radicale comptant cinquante-deux eurodéputés issus de quatorze pays différents, de la part des représentants des partis europhobes EFDD, à commencer par le Britannique Nigel Farage, du Front national ou encore par le Mouvement 5 étoiles italien. Pour ces eurodéputés, il est « intolérable qu’une personne qui a été responsable d’un système d’évasion fiscale soit un représentant de l’Union européenne » (1).

D’autre part, les auteurs de cette motion de censure accusent le président de la Commission européenne d’être la cause de tous les maux de l’Europe. Ils se sont montrés déçus du peu de soutien de leurs collègues parlementaires critiquant de ce fait « l’hypocrisie européenne ». Concrètement qu’en est-il de cette motion de censure ? La motion a été examinée lors d’une séance plénière à Strasbourg du 24 au 26 novembre, puis soumise à un vote. Pour pouvoir dissoudre la Commission, elle devrait être adoptée par une double majorité: deux-tiers des suffrages exprimés et une majorité de l'ensemble des députés (soit 376 voix) (2).

Avant-même le début de la séance plénière, tout le monde savait qu’elle n’avait aucune chance de passer. Résultat ? La motion déposée par les partis anti-européens a été rejetée par 461 voix. Malgré cela, 101 eurodéputés ont voté en faveur de celle-ci et 88 ont préféré s’abstenir (3).

Ce résultat était attendu puisque les principales formations de droite et de gauche ont préféré maintenir leur soutien au collège de commissaires et à son président, qui était plus particulièrement visé par la procédure.

Ce qui est inédit et à ne pas négliger, c’est l’alliance entre des forces qui dans un contexte différent ont beaucoup de mal à se trouver des points communs. Cela risque, en effet, de déranger les forces politiques au sein-même du Parlement. Pour le quotidien Les Echos, « cette motion Le Pen / Farage pourrait avoir pour effet inattendu de resserrer les rangs chez les socialistes qui avaient refusé de voter la confiance à la Commission Juncker en octobre ».

Le paradoxe est que ce vote conforte le président de la Commission européenne, alors même que de nombreux eurodéputés sont extrêmement critiques sur son passé. En effet, 461 eurodéputés ont voté contre cette défiance, apportant de ce fait leur soutien et leur confiance au président de la Commission. Or, seulement 426 eurodéputés avaient voté pour Juncker au moment de son investiture. Toutefois, la crédibilité de la Commission Juncker risque d'être entachée par cette affaire car, le principal motif de refus de cette motion ce sont les auteurs. Néanmoins, ses arguments rassemblent les critiques de la gauche radicale, des Verts, des sociaux-démocrates voire même des centristes contre l'évasion fiscale.

Références :

(1) : Le monde, Motion de censure au Parlement européen contre la Commission Juncker, 18/11/2014
(2) : Europarl, Luxleaks : débat sur la motion de censure contre Mr Juncker et son équipe, 24/11/2014
(3) : Euronews, Commission Juncker : motion de censure rejetée, 27/11/2014