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Une armée kosovare pour affirmer sa souveraineté

Le Parlement kosovar a voté le 14 décembre dernier la création d’une armée kosovare, pour selon les dires des dirigeants, « affirmer la souveraineté du Kosovo ». Affirmer sa souveraineté, proclamée depuis 2008, mais par rapport à qui ? Par rapport à la communauté internationale dans un premier temps, puisque le Kosovo ne fait pas partie de l’ONU, et vis-à-vis de la communauté internationale qui ne reconnâit pas l’indépendance du Kosovo (on pense notamment à l’Espagne ou la Grèce en Europe, ou encore la Chine et la Russie à l’international). Dans un deuxième temps par rapport à la Serbie. La partie nord du Kosovo, qui représente 15% de son territoire est majoritairement serbophone, et la possibilité d’un « échange de territoire » a été envisagé, avec la partie albanophone de l’extrême sud de la Serbie. Ces éléments renforcent l’idée que la Serbie et la Kosovo sont liés par l’histoire, fruits de la dislocation de l’ex-Yougoslavie. Jusqu’ici c’était le KFOR qui faisait office d’armée au Kosovo, qui sont des forces armées mandatées par l’ONU pour protéger la paix ainsi que les frontières de ce pays, et ce notamment depuis la fin de la guerre entre forces serbes et rebelles indépendantistes kosovars albanais, de 1998-1999 et qui a fait plus de 13 000 morts. La Serbie a reçu cette volonté de la part du Kosovo d’avoir sa propre armée comme une menace. Tension exacerbée, et ce notamment depuis l’instauration de droits douaniers.

L'économie comme argument de poids

Ces tarifs douaniers de 100% sur les produits importés de Serbie au Kosovo font suite à désir de vengeance de la part du Kosovo. En effet, la candidature des kosovars à Interpol s’est vue refusée, et la responsabilité des serbes dans ce refus a été décriée. Ces tarifs douaniers peuvent entraîner des pénuries importantes, et les serbes du Kosovo ont manifesté, écrivant sur des pancartes des messages comme ceux-ci : « Nous n'avons pas de médicaments ! », « Stop à la violence de Pristina ! », « Des droits de douane de 100% nous poussent dans des ghettos ! ». C’est donc potentiellement 400 millions d’euros de produits importés de Serbie qui pourraient être taxés à 100%, une catastrophe pour les serbophones, renforçant le sentiment de fracture dans un pays, le Kosovo, déjà divisé. Bruxelles et Washington ont demandé l'annulation de ces mesures, mais le Premier ministre Ramush Haradinaj a prévenu qu'elles resteraient en vigueur tant que la Serbie ne reconnaîtrait pas l'indépendance de son pays.

La question kosovare au coeur des débats sur l'entrée de la Serbie dans l'UE

La question du Kosovo dans l’adhésion de la Serbie à l’UE semble primordiale. Il a été répété plusieurs fois, notamment par la ministre des affaires étrangères de l’Union Européenne, Federica Mogherini, que si la Serbie n’était pas dans une voie de normalisation des relations avec son voisin, sa candidature ne pourrait aller plus loin. La procédure ouverte depuis 2009 ancre la tension et les conflits entre le Kosovo, l’Albanie, et la Serbie dans une histoire plus longue que celle des derniers jours. C’est donc un dilemme qui se présente pour la Serbie. Reconnaître l’indépendance du Kosovo, et donc renoncer à ses prétentions sur le territoire nord du pays, et intégrer l’Union Européenne, ou bien s’enraciner dans un conflit larvé. L’Union européenne elle-même semble divisée sur cette question, sur les 27 pays membres, 22 reconnaissent l’indépendance du Kosovo. La question européenne pour la Serbie semble donc être la carotte pour fermer la page sur ces conflits et violences avec son voisin.

Sources

http://ceriscope.sciences-po.fr/node/208

https://www.lemonde.fr/international/article/2018/12/14/le-kosovo-se-dote-d-une-armee-pour-affirmer-sa-souverainete_5397610_3210.html

https://www.taurillon.org/serbie-kosovo-le-nationalisme-c-est-la-guerre

https://www.atlantico.fr/node/3559861

https://www.euractiv.fr/section/elargissement/news/juncker-normalisation-deal-with-kosovo-is-key-for-serbias-eu-bid/