Des troncs carbonisés sur une étendue de jungle amazonienne, récemment brûlée par des bûcherons et des agriculteurs, à Porto Velho, au Brésil, le 23 août 2019 - REUTERS/Ueslei Marcelino.

Cette réglementation s'inscrit dans la ligne du Green Deal européen avec l'objectif de protéger les forêts primaires, mais plus largement « à la dégradation des forêts où que ce soit dans le monde » (1).

Proposée initialement en novembre 2021 par la Commission européenne, cette proposition fait suite à l’engagement lors de la COP26 de Glasgow en 2021 pris par « plus de 100 pays, dont la France » de « s'engager à stopper la déforestation et restaurer les forêts d’ici à 2030 » (2) comme le rapporte France info. La déforestation importée est un enjeu majeur dans une économie mondialisée, mais elle ne concerne aujourd’hui qu’une minorité de pays développés qui canalisent la large majorité de celle-ci.

La répartition de la déforestation importée en 2013 - OurWorldInData.org.

La négociation autour du champ d’application : l’extension de la liste des produits et écosystèmes visés par cet accord



En novembre 2021, comme rapporté par Euronews, dans le texte proposé par la Commission européenne "La liste initiale des denrées alimentaires visées couvre le soja, le bœuf, l'huile de palme, le cacao et le café, ainsi que le bois » (3).



La liste des produits visés par l’accord a ensuite fait l’objet de négociations importantes entre les États membres et les eurodéputés. Les eurodéputés ont permis en septembre le renforcement significatif de la proposition, en proposant une extension de celle-ci avec l’ajout du « charbon de bois, les produits en papier imprimé et un certain nombre de dérivés de l'huile de palme. » (4).



Le Parlement européen a également obtenu des négociations l’élargissement de la définition de la dégradation des forêts à un ensemble plus large que celui proposé initialement par la Commission.



Un accord nécessaire mais également novateur

Comme le décrit Pascal Canfin, député européen et président de la commission environnement au Parlement européen, dans des propos rapportés par Le Monde « Il s’agit d’une première dans le monde ! C’est le café du petit-déjeuner, le chocolat que nous mangeons, le charbon dans nos barbecues, le papier de nos livres. C’est radical » (5).

Le texte semble donc novateur, même s’il s’inscrit dans une mouvance internationale de lutte contre la déforestation, il a l’avantage d’imposer des règles strictes pour un marché large. Cependant, si le texte est novateur, il répond à un contexte où l’UE a une place prépondérante dans la déforestation importée. En effet, selon la WWF, l’UE est le deuxième plus grand importateur de déforestation et a été responsable en 2017 de 16 % de celle-ci (6).

Un fonctionnement qui s'appuie sur une diligence raisonnée avec des mesures coercitives faibles



Comme le décrit Eurativ en reprenant la Commission, « lorsque les nouvelles règles entreront en vigueur, toutes les entreprises concernées devront faire preuve d’une diligence raisonnable stricte si elles se placent sur le marché de l’UE » (7).

Pour le contrôle, « L’Union européenne se basera sur des images satellites fournies notamment par le satellite Copernicus. », « Il sera possible, au kilomètre carré près, de voir si la culture s'est étendue au détriment de la forêt environnante. Si c’est le cas, le produit n'entrera pas sur le marché européen. »(8) comme le précisait Rfi lors de la proposition de la Commission en 2021. Ces contrôles seront réalisés par pourcentages des matières importés en fonction du niveau de risque du pays d’exportation (9% des exportations pour les pays à risque élevé par exemple (1)).

Le texte prévoit en cas non-respect, une mesure coercitive financière, avec une amende fixée à au moins 4% du chiffre d’affaires annuel total dans l’UE comme le décrit le communiqué du Parlement (1).

Des faiblesses dans la structure du règlement

Malgré un caractère novateur, le texte proposé comporte des faiblesses notamment par sa liste limitée de secteurs concernés, comme le rapporte la députée européenne Marie Toussaint auprès de Médiapart : « Le secteur financier a été exclu du règlement, (…), grâce à l'action de certains États membres soucieux de protéger leurs banques... » (9).



Virginijus Sinkevicius, commissaire à l'environnement, se félicite de « la première loi au monde à lutter contre la déforestation mondiale »(10) comme le rapporte El País. Si cet accord apparaît comme une victoire, c’est parce que l’espoir que la proposition agisse comme un exemple à la veille de la Conférence de Montréal sur la biodiversité (COP15), dans un contexte où la lutte contre le réchauffement climatique ne pourra se faire sans la protection des forêts partout dans le monde.

Sources et références :