L’improbation des accusations et suspicions dont Ioulia Timochenko fait l’objet suscitent un inhabituel consensus au sein du Parlement Européen. Condamnée à 7 ans de prison pour « abus de pouvoir » le 11 octobre 2011 et, depuis le 24 octobre, accusée de détournements de fonds et de fraude fiscale, l’ex Première ministre ukrainienne et actuelle chef de l’opposition a décidé de faire appel en prenant l’Union Européenne à témoin. Il est vrai que le contexte de ces accusations peut sembler sujet à controverse. Ioulia Timochenko a été condamnée pour avoir conclu, en 2009, lorsqu’elle était Premier ministre, des accords gaziers avec la Russie considérés comme défavorables à son pays. Les nouvelles accusations dont elle fait l’objet, cette fois dans le domaine de la fiscalité, sont vieilles de quinze ans et datent de l’époque où elle était à la tête d’un groupe énergétique. L’exhumation de ces vieux dossiers ne semble pas convaincre l’Union européenne. Bien au contraire, les voix s’élèvent et s’unissent au sein du Parlement Européen qui remet en question l’intégrité d’une justice ukrainienne aux aspects quelque peu sélectifs. En effet, il faut souligner que dix anciens membres du gouvernement Timochenko ont également été arrêtés. De plus, trois grands projets de lois anti-corruption élaborés par ce gouvernement et approuvés par les experts du Conseil de l’Europe et de l’Organisation pour la sécurité et la coopération en Europe ont été retirés par Victor Ianoukovytch, l’actuel Premier ministre ukrainien.

Ces évènements ont provoqué un refroidissement des relations entre l’Ukraine et l’Union Européenne qui tendaient à se rapprocher par le biais d’un accord d’association bilatéral sur le point d’être ratifié par le Parlement Européen. Cet accord, dont l’Union européenne et l’Ukraine avaient déclaré avoir bouclé les dernières négociations techniques aux alentours du 20 octobre 2011, comporte un important volet de libéralisation des échanges, ainsi qu’un important volet politique. Or sa signature dépend actuellement de la réaction de la justice ukrainienne face à la procédure d’appel d’Ioulia Timochenko. En effet, le 27 octobre 2011, lors de la seconde session plénière d’octobre, cinq groupes politiques (le Parti populaire, les Socialistes et démocrates, les Libéraux et démocrates, les Conservateurs et réformistes, et les Verts) ont voté une résolution commune sur la situation en Ukraine. Celle-ci stipule qu’  « un refus de réexaminer la condamnation d'Ioulia Timochenko mettrait en péril la conclusion de l'accord d'association et sa ratification, tout en éloignant le pays encore plus de la concrétisation de sa perspective européenne ». Le Parlement Européen déplore en effet «  la sentence rendue contre l'ancienne première ministre, Ioulia Timochenko, comme une violation des droits de l'homme et un abus du pouvoir judiciaire aux seules fins de museler la dirigeante de l'opposition politique en Ukraine ». Il souligne enfin que « la loi appliquée de manière sélective contre Mme Timochenko remonte à l'ère soviétique et qu'elle prévoit de poursuivre pénalement des décisions politiques ».

Si cette affaire passe relativement inaperçue derrière l’explosion médiatique que provoquent les évènements liés à la crise grecque et européenne ou les pulsions hyperdémocratiques de Georges Papandréou , la question ukrainienne agite tout de même quelques plumes et claviers internautes. Cette affaire touche en effet à l’une des grandes valeurs de l’Union Européenne qu’est la séparation qui doit exister entre les pouvoirs exécutifs et juridiques.

SOURCES :

Texte officiel de la Résolution du Parlement européen du 27 octobre 2011 :

« Résolution du Parlement européen du 27 octobre 2011 sur l'évolution actuelle de la situation en Ukraine » (texte officiel), Rubrique Activités, Rubrique Plénière, Site officiel du Parlement européen, http://www.europarl.europa.eu/sides/getDoc.do?pubRef=-//EP//TEXT+TA+P7-TA-2011-0472+0+DOC+XML+V0//FR&language=FR, dernière mise à jour : le 03/11/2011.