Source : Georges Gobet, AFP
Le mardi 5 novembre 2013 Egemen Bagis, ministre turc des Affaires étrangères, et Štefan Füle, commissaire à l’élargissement et à la politique européenne de voisinage, reprenaient à Bruxelles le dialogue visant à faire de la Turquie le vingt-neuvième membre de l’Union européenne, trois ans après sa suspension. Le moins que l’on puisse dire est que le processus d’entrée du pays dans l’Union traîne en longueur : si la demande officielle a été déposée en 1999 et les négociations engagées en 2005, la Turquie fut le premier Etat à demander son association à la CEE. Il s’agit de la plus longue procédure jamais engagée entre l’Union européenne et un pays candidat.
Bruxelles au départ freinait fortement l’intégration de la Turquie. En effet, cette dernière péchait au niveau du respect des droits fondamentaux. En outre, elle aurait eu une influence considérable par son poids démographique. Mais aujourd’hui les deux protagonistes sont à mettre sur le banc des accusés. L’Europe entend toujours rester ferme sur le respect des critères de Copenhague, établis lors du conseil européen de Copenhague en 1993. Tout d’abord le critère politique indique que le candidat doit avoir des institutions stables et démocratiques, qui garantissent les droits de l’homme. Ensuite le volet économique précise que l’État doit avoir une économie de marché viable. Enfin, le dernier critère est celui de l’acquis communautaire, autrement dit la capacité à respecter les obligations de l’adhésion. Or l’État turc, bien qu’ayant une économie de marché viable, a encore des efforts à fournir dans l’observation des droits fondamentaux. On notera la condamnation à la prison à vie le 4 novembre de 6 journalistes membres d’un parti interdit, sans oublier la violente répression des manifestations de mai 2013. Nées d’une protestation contre le projet d’aménagement de la place Taksim à Istanbul, ces manifestations avaient vite dégénéré en contestation du régime et de la répression policière. Cette répression, fermement condamnée par Catherine Ashton, avait conduit au retardement de la reprise du dialogue sur l’adhésion. Le refus de la reconnaissance de la République chypriote, pourtant prévue dans le protocole d’Ankara de 2005, est également un point de discorde.
De son côté la Turquie, dont le taux de croissance a de quoi faire pâlir d’envie les économies les plus florissantes d’Europe, est moins pressée d’entrer dans une Union européenne qui peine à sortir de la crise. L’Euro a perdu de son attrait. En outre, Egemen Bagis indique que l’opinion publique turque commence à se lasser d’attendre une adhésion toujours repoussée.
Ces négociations s’appuient sur l’ouverture d’un nouveau chapitre, le vingt-deuxième, qui traite de la politique régionale. Štefan Füle souligne dans un communiqué du 7 novembre 2013 les efforts faits par Ankara dans son processus de réformes, en particulier en matière de droits des femmes et du combat contre l’impunité de la pratique de la torture. Il souhaite que le gouvernement turc poursuive dans ce sens, afin de permettre l’ouverture des chapitres de négociations 23 et 24 sur la justice, les droits fondamentaux, la liberté et la sécurité. En effet, jusqu’ici seul un unique chapitre sur les 14 ouverts a été clos, sachant que 35 sont prévus. En aval des critères de Copenhague, le commissaire européen insiste également sur la nécessité d’ouvrir le dialogue sur la question des visas.
Cependant au vu du chemin qui reste à parcourir, on en arrive à se demander si la Turquie peut enfin espérer réaliser son rêve européen.
FABRE Tiphaine
Sources :
- Sites institutionnels :
http://europa.eu/rapid/press-release_MEMO-13-958_en.htm
http://europa.eu/rapid/press-release_SPEECH-13-891_en.htm
- Presse française :
http://www.touteleurope.eu/index.php?id=30&tx_atoltlecontenus_base%5BbaseContent%5D=7797&cHash=b8c337008a6f2e5a3e74270997a1c07b
http://www.touteleurope.eu/les-politiques-europeennes/elargissement/synthese/la-turquie-et-lunion-europeenne-50-ans-de-negociations.html
http://www.lemonde.fr/international/article/2013/06/04/deux-personnes-sont-mortes-a-l-occasion-des-manifestations_3423591_3210.html
- Presse internationale :
http://fr.euronews.com/2013/11/05/turquie-le-dialogue-avec-bruxelles-repart-du-bon pied/?utm_source=feedburner&utm_medium=feed&utm_campaign=Feed%3A+euronews%2Ffr%2Feuropa+%28euronews+-+europa+-+fr%29&utm_content=Netvibes
http://www.lematin.ma/journal/processus-d-elargissement_l-ue-et-la-turquie-reviennent--a-la-table-des-negociations/190693.html