Cinq jours seulement après sa prise de fonction, le nouveau président de la Commission européenne, le Luxembourgeois Jean-Claude Juncker se retrouve au milieu d’un scandale financier communément appelé Luxleaks

C’est le 5 novembre 2014 que ce scandale éclate au grand jour. En effet, l’International Consortium of Investigative Journalists ainsi qu’une quarantaine de média internationaux dont Le Monde, L’Asahi Shimbun, Le Soir et The Guardian, révèlent que des centaines d’accords fiscaux ont été conclu entre le Luxembourg et des multinationales (1).

A cette occasion, l’Europe a l’occasion de découvrir plus de 28 000 pages d’accords fiscaux mettant bien en évidence l’exil fiscal de plus de 1 000 entreprises internationales, et ce, avec l’approbation de l’administration luxembourgeoise des impôts (2). Des multinationales connues sont concernées comme Pepsi, Ikea, Amazon, Apple ou bien encore Heinz. Néanmoins, le « ruling », technique qui permet aux entreprises d’échapper à la majeure partie de l’impôt, est une pratique légale au Luxembourg et qu’elle ne viole aucune loi européenne ou internationale.

Ce scandale menace fortement la crédibilité du nouveau président de la Commission qui, dans son passé, a endossé le rôle de ministre des finances et de Premier ministre du Grand-Duché. De nombreuses critiques à son égard ont donc déjà fusées, certains vont même jusqu’à vouloir sa démission en invoquant le fait qu’il savait pertinemment ce qui se passait.

Qu’en est-il de la réaction du principal intéressé ? Il admet, il se défend, il contre-attaque. Dans une interview il a déclaré : « Je suis politiquement responsable de ce qui s’est passé dans chaque recoin de mon pays » (3). Mais derrière, Juncker sait parfaitement qu’aucun autre pays ne peut crier au scandale car tous les Etats européens font en sorte d’attirer les plus grandes entreprises. Il ne faut pas aller chercher très loin pour trouver des exemples qui illustrent ces propos. Il suffit de rester en France et de choisir une multinationale des plus importantes : TOTAL. Total, paye ses impôts à l’étranger, le saviez-vous ? Le groupe Total présente un paradoxe fiscal : c’est un gros contribuable mondial, mais en France, il ne paye aucun impôt sur les sociétés malgré son chiffre d’affaires de près de 190 milliards d’euros. Le groupe est imposé sur ses activités d’exploration et d’extraction mais dans les pays où il opère. Par conséquent, plus de la moitié (52,9 %) des sommes sont acquittées en Afrique. Cette mauvaise image l’a cependant conduit à amorcer le rapatriement en France d’une partie de ses filiales basées dans des paradis fiscaux (4).

Après avoir admis, Juncker a tout de même riposté mercredi en démentant tout "conflit d'intérêts" et en promettant un sursaut dans la lutte contre ce phénomène. Il propose ainsi que toutes les tax rulings soient communiqués entre les pays européens de manière automatique.

La polémique a enflé quand les Pays-Bas pour Starbucks ou encore l’Irlande pour Apple ont été informés par une lettre que la Commission européenne enquêtait de manière formelle sur des aides d’État, qu’elle soupçonne illégales.

Affaire à suivre …

Références :
1 : Le Monde, "Evasion fiscale, tous les secrets du Luxembourg", 05/11/2014
2 : The Guardian, "Luxembourg tax files : how tiny state rubber-stamped tax avoidance on an industrial scale", 05/11/2014
3 : Euronews, "Juncker répond aux Lux Leaks", 12/11/2014
4 : Le Monde, "Total paye ses impôts … à l’étranger", 22/10/2014