Le processus d’adhésion des pays de l’ex Yougoslavie (sauf la Croatie) à l’Union européenne reste toujours aussi lent qu’il était il y a quelques années. Beaucoup de problèmes comme la corruption, le manque de bonne volonté de la part des hommes politiques voire les conséquences des guerres des années 90s, les empêchent d’appliquer les réformes nécessaires et exigées qui leur permettraient d’adhérer. Parmi ces pays, il y en a un dont les problèmes intérieurs à résoudre sont beaucoup plus difficiles et qui, ce dernier mois, s’est trouvé au cœur des actualités européennes – la Bosnie.

Le 4 novembre dernier, le ministre des affaires étrangères allemand Frank-Walter Steinmeier et son homologue anglais Philip Hammond ont lancé un nouveau plan concernant le chemin que doit suivre la Bosnie dans ses efforts d’adhérer à l’Union européenne. Quelques jours plus tard, Federica Mogherini, Haut Représentant de l’UE pour les affaires étrangères, a déclaré qu’elle « prenait en considération les idées qui lui étaient présentées et que la Bosnie devait retourner à la voie des réformes ». En effet, le progrès du pays est considéré comme une continuité logique des élections parlementaires qui se sont déroulées en octobre 2014. De leur côté, Steinmeier et Hammond préconisent un plan de réforme plus large qui doit être essentiellement défini par le gouvernement bosniaque et qui devrait couvrir tout ce qui concerne la bonne gouvernance, les questions économiques, l’Etat de droit ainsi que les questions institutionnelles. Selon eux, le processus d’élargissement et sa conditionnalité sont «un pilote pour une véritable réforme et stabilité dans la région ».

Jusqu’ici tout va bien. Néanmoins, le point intéressant du plan, qui n’est malheureusement pas suffisamment cité, est la mise en œuvre de l’accord « Sejdic-Finci ». La contradiction était provoquée par la priorité donnée aux réformes économiques et institutionnelles alors que le traitement de ce sujet douloureux a été laissé au deuxième plan. Par conséquent, la question de savoir si Steinmeier et Hammond n’ont pas reporté cette réforme-là, pourtant considérée d’une importance majeure, s’est déjà posée. Mais de quoi s’agit-il ?

Il est connu qu’en 2009 un contentieux a eu lieu entre deux Bosniaques – Dervo Sejdic et Jacob Finci et la Bosnie. Le fond de la question était les accords de Dayton signés en 1995 selon lesquels la Présidence Tripartite et la Chambre des peuples de la Bosnie n’étaient réservées qu’aux Bosniaques, Serbes et Croates de la Bosnie. Les autres groupes ethniques dont font partie Sejdic et Finci en tant que bosniaques respectivement d’origine rom et juive, n’avaient ni le droit d’être élus ni d’accéder au pouvoir. En réalité, en 2009 la Cour européenne des droits de l’homme a constaté que l’impossibilité des candidats à se présenter aux élections à la Chambre des peuples violait l’article 14 de la Convention européenne des droits de l’homme. C’est la raison pour laquelle les hommes politiques de la Bosnie se sont engagés à résoudre le problème, mais en réalité ils ont été incapables de le faire.

Par conséquent, cette réforme serait d’une grande envergure pour le progrès politique de la Bosnie. Mais il reste une question dont la réponse n’est pas claire – d’où vient-il ce doute que l’Union européenne ait reporté sa mise en œuvre ? En lisant attentivement la lettre officielle qui a été envoyée à Federica Mogherini, nous nous rendons compte qu’effectivement la priorité a été donnée aux réformes économiques et institutionnelles. Cependant, dans son ensemble, le document souligne bien l’importance de l’application du cas « Sejdic-Finci » comme un pas indispensable vers l’adhésion à l’Union européenne. Et nous pouvons très facilement le constater dans les trois points recommandés à suivre pas Steinmeier et Hammond.

Et si la proposition des Messieurs n’est pas un vrai recul, qu’est-ce donc ? Plusieurs explications pourraient être proposées. D’abord, il est vrai que les Bosniaques ont peu de confiance dans les internationaux qui viennent et s’en vont. Pourtant, il semble que cette fois-ci l’initiative politique leur ait été donnée pour qu’ils puissent démontrer leur volonté de changement drastique. En fin de compte, c’est eux-mêmes qui doivent essayer de changer les choses. Puis, les Balkans représentent une région très importante pour la démocratie et la paix en Europe. Et la Bosnie, en tant qu’un pays qui a deux fois éclaté la stabilité de ce côté du continent, n’en fait pas exception. Etant donné qu’à la différence de la Serbie, la société bosniaque reste plutôt unifiée autour de l’idée d’adhérer à l’Union européenne, il semblerait que la proposition de Steinmeier et Hammond soit une très belle opportunité pour faire avancer le processus. Le plut tôt sera le mieux.

Sources utilisées: http://eeas.europa.eu/statements-eeas/2014/141106_01_en.htm

http://www.dnevnik.bg/evropa/2014/11/07/2414482_mogerini_bosna_i_hercegovina_otnovo_da_trugne_po_putia/?ref=rss

http://www.foxnews.com/world/2014/11/06/eu-and-us-welcome-new-plan-for-bosnia-path-toward-eu-membership/

http://www.economist.com/blogs/easternapproaches/2014/11/bosnia

http://www.paneuropeannetworks.com/government/eu-welcomes-new-approach-on-bosnia/

http://europa.ba/News.aspx?newsid=7482 http://en.wikipedia.org/wiki/Sejdi%C4%87_and_Finci_v._Bosnia_and_Herzegovina