Selon l'Organisation Mondiale de la Santé, la vente de produits médicaux contrefaits a atteint les 75 milliards de dollars en 2010. Elle représente aujourd'hui 10 % du commerce mondial. Cela touche 523 types de médicaments différents, allant des compléments alimentaires aux vertus miraculeuses, jusqu'à la vente de faux contraceptifs, en passant par des produits expirés, volés ou encore dilués.
La contrefaçon de médicaments est présente dans tous les pays du monde et rapporte vingt fois plus que le trafic de stupéfiants. Cela constitue une réelle menace à la santé publique, et provoque l'ébranlement de la confiance des citoyens dans les systèmes de santé et dans leurs autorités de surveillance. C'est plus généralement le droit à la vie inscrit dans la Convention Européenne des droits de l'homme qui est touché par ce type de trafic illégal. Le manque de législation harmonisée au niveau international permettait jusqu'à présent aux trafiquants de ce type de produits de s'en sortir avec des sanctions dérisoires.
Depuis 2004, le Comité des ministres du Conseil de l'Europe travaille sur l'élaboration d'un traité de droit pénal international qui criminaliserait plus fortement et efficacement ce genre de pratiques. Fin 2010, il a adopté la « Convention du Conseil de l’Europe sur la contrefaçon des produits médicaux et les infractions similaires menaçant la santé publique », ou Convention Médicrime, ouvert à la signature depuis le 28 octobre 2011. Il constitue le premier outil international permettant de criminaliser la contrefaçon, mais aussi la fabrication et la distribution de produits médicaux mis sur le marché sans autorisation ou en violation des normes de sécurité. Cette Convention constitue en ce sens un cadre normatif extrêmement complet. En effet, elle érige en infraction la complicité et la tentative de commission d'une contrefaçon. Elle met en place des mesures de prévention, comme des campagnes de sensibilisation, des systèmes d'alertes, ou encore des programmes de formation à destination des agents de la fonction publique ou des professionnels de santé. Médicrime s'attache fortement à la protection des victimes, avec l'instauration d'un droit au dédommagement et à l'assistance dans le rétablissement physique psychologique et social.
Elle propose des sanctions efficaces comme l'emprisonnement, la réclusion criminelle, et l'extradition.Les personnes morales ne sont pas épargnées par Médicrime En effet, certaines sanctions peuvent interdire temporairement ou définitivement à une entreprise d'exercer une activité commerciale. Cette Convention constitue un élément indispensable d'harmonisation internationale car elle prévoit plusieurs moyens de coopération à différentes échelles. Elle instaure notamment une coopération internationale entre les différents Etats signataires, tant d'un point de vue pénal qu'administratif. Au niveau national, elle permet un échange d'information entre les différents représentants des autorités sanitaires, des douanes et des forces de l'ordre, ce qui permet d'accroitre la rapidité de l'échange des information.
Enfin, Médicrime prévoit la création d'un organe de suivi chargé de superviser la mise en place de la Convention par les Etats parties. Pour répondre à cette menace mondiale, le Conseil de l'Europe a ouvert la ratification de cette Convention aux Etats membres et non membres de l'institution, ce qui lui octroie un champ d'application extrêmement large.
Cependant, bien qu'elle ait été signée par 26 Etats, elle n'a été ratifiée que par l'Ukraine, l'Espagne, la Hongrie, la Moldavie et la Guinée. Beaucoup d'Etats européens n'ont donc pas encore pris de réel engagement, notamment à cause d'un vrai manque de prise de conscience du danger des médicaments contrefaits. Selon une enquête menée par Happycurious pour l'entreprise Sanofi, seulement 20 % des personnes sondées associent la contrefaçon aux médicaments, loin derrière d'autres types de contrefaçons comme le luxe, les vêtements ou l'électronique.
En France, la ratification était en examen le 17 décembre 2015. Cependant, aucune nouvelle information n'a été relayée dans les médias depuis cette date. Elle ne semble donc pas extrêmement pressée de ratifier Médicrime. Cela pourrait s'expliquer parce que système de santé français permet de lutter relativement efficacement contre ce type de contrefaçon. En effet, un patient a peu d'intérêt à acheter, dans un autre circuit, un médicament qui lui sera remboursé dans le circuit traditionnel.
Même si le taux de pénétration de produits médicaux contrefaits reste faible, cela ne signifie pas que la menace est totalement inexistante. L'Organisation Mondiale de la Santé avertit qu'un médicament sur deux vendu sur internet est contrefait. C'est donc un réel danger qui doit être pris en compte par tous les pays du monde, et le seul moyen de lutter efficacement contre cette contrefaçon aujourd'hui est de ratifier Médicrime.
Sources:
http://www.iracm.com/observatoire-thematique/la-convention-medicrime/
https://www.edqm.eu/fr/convention-medicrime-1470.html
http://lematin.ma/express/2015/entree-en-vigueur-le-1er-janvier-2016/238416.html
http://www.lesechos.fr/idees-debats/cercle/cercle-146441-contrefacon-de-medicaments-comment-lutter-efficacement-1190351.php
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http://www.lesechos.fr/15/05/2014/LesEchos/21688-082-ECH_medicaments-la-contrefacon-n-inquiete-pas-les-europeens.htm#addmJp0psGkM46dC.99| http://www.lesechos.fr/15/05/2014/LesEchos/21688-082-ECH_medicaments-la-contrefacon-n-inquiete-pas-les-europeens.htm#addmJp0psGkM46dC.99]