La Charte des langues régionales ou minoritaires, adoptée en 1992 par le Comité des Ministres du Conseil de l'Europe a un objectif principalement culturel : sauvegarder et promouvoir la richesse et la diversité du patrimoine culturel européen. Elle permet de favoriser l'emploi des langues régionales et minoritaires, « les langues dépourvues de territoire, et les langues officielles moins répandues », comme l'affirme le Conseil de l'Europe.

Cette Charte a jusqu'à présent été ratifiée par 25 Etats. Huit autres Etats l'ont simplement signée, et leur ratification demeure, comme en France, en attente. La spécificité de ce texte est qu'il propose une liste de 98 mesures susceptibles d'être adoptées par les pays qui la ratifient. Chaque Etat choisit dans ces mesures les dispositifs qu'il souhaite adopter. La France, qui a choisi 39 de ces mesures, a, une nouvelle fois, refusé de ratifier cette Charte.

Le 27 octobre 2015, le Sénat a rejeté le projet de loi constitutionnelle de ratification de la Charte par 180 voix, (parmi lesquelles celles des Républicains, UDI et les divers droite) contre 155. Une proposition de loi similaire avait recueilli un large nombre de voix favorables (361 contre 149) en janvier 2014. Pourquoi alors, la Charte n'a-t-elle donc pas été ratifiée ? Plusieurs considérations sont à prendre en compte.

Comme en 1999, lors du premier rejet de ratification de ce texte, l'argument de fond principal est que la ratification porterait atteinte à « l'Unité de la République» comme l'affirme un article du Figaro, qui ajoute que cela reviendrait à « déconstruire l'unité française ». La France est Jacobine, et elle doit le rester.

Le problème résiderait également dans la Déclaration interprétative ajoutée au projet de loi, ajoutant des éléments permettant à la Charte d'être compatible avec la Constitution française, et notamment en assurant « l'égalité de tous les citoyens, sans distinction d'origine, de race ou de religion » article 1er . En effet, pour certains sénateurs Charte et Déclaration sont deux textes incompatibles. Les approuver reviendrait à accepter des incohérences fondamentales dans la Constitution.

Cependant, les vraies motivations du refus semblent relever du jeu politique. En effet, certains sénateurs républicains et centristes issus de régions où les langues régionales sont encore appliquées, sont favorables à cette ratification. Mais quelques semaines avant les élections régionales, la droite a voulu d'une part se montrer unie afin de marquer son opposition au gouvernement socialiste, et d'autre part, concurrencer le Front National et s'octroyer une partie de ses électeurs assimilant les langues régionales et minoritaires aux langues pratiquées par les migrants. Néanmoins, ce discours est basé sur de fausses considérations: la Charte ne vise pas les langues liées aux phénomènes migratoires.

La ratification de cette Charte, véritable serpent de mer des différents gouvernements, ne semble pas avoir de réelle utilité aujourd'hui, car de nombreuses mesures présentes dans le projet de loi sont déjà appliquées. Cela permettrait tout de même d'empêcher tout recul probable lors d'un changement de gouvernemental.

Sources:
http://www.coe.int/t/dg4/education/minlang/aboutcharter/default_fr.asp

http://www.franceinfo.fr/actu/politique/article/le-senat-rejette-le-projet-de-loi-de-ratification-de-la-charte-europeenne-des-langues-regionales-741405

http://www.lexpress.fr/region/charte-europeenne-des-langues-regionales-les-vraies-raisons-du-refus-du-senat_1730148.html

http://www.lexpress.fr/region/langues-regionales-avec-ou-sans-charte-le-gouvernement-agit_1730181.html

http://www.lefigaro.fr/vox/politique/2015/10/26/31001-20151026ARTFIG00281-charte-europeenne-des-langues-regionales-une-atteinte-a-l-unite-nationale.php