FRONTEX : l'agence au cœur des discussions et des polémiques. FRONTEX, dont le nom est l'abréviation de l'expression « Frontières extérieures » est l’agence européenne pour la gestion de la coopération opérationnelle aux frontières extérieures des États membres de l'Union européenne. Elle a été créée par le règlement du Conseil du 26 octobre 2004 et est une structure active depuis le 1er mai 2015. Les missions de FRONTEX sont diverses : la coordination de la coopération opérationnelle entre les États membres de l'UE pour la gestion et la surveillance des frontières extérieures ; l'assistance aux États membres pour la formation des garde frontières nationaux. Cela comprend aussi la mise en place de normes de formations communes européennes en la matière. la mise au point d'un modèle d'évaluation commun et intégré des risques ainsi qu'un travail d'analyse des risques générales et spécifiques ; le suivi de l'évolution de la recherche pouvant servir les activités de contrôle et de surveillance des frontières extérieures ; l'assistance aux les États membres dans les situations qui exigent une assistance technique et opérationnelle renforcée aux frontières extérieures ; mais aussi dans l'organisation des opérations de retour.

Ces missions agissant sur un terrain sensible, FRONTEX n'a pas échappé aux critiques quant à ses actions, principalement pour ses activités opérationnelles. En 2009, l'ONG Human Rights Watch dénonçait l'implication de l'agence dans une opération conjointe avec garde-côtes italiens pour renvoyer des migrants libyens qui auraient pu être considérés comme demandeurs d'asile vers la Libye. Deux années plus tard, l'ONG publiait un rapport accablant ou l'agence était accusée de transférer des migrants interceptés en mer dans des centres de détentions en Grèce aux conditions de vie intolérables. Globalement, l'agence a été accusée de bien des maux et de n'avoir aucune transparence dans ses activités. C'est pourquoi l'UE a réagi en 2011, en dotant l'agence de divers outils comme un code de conduite respectant les droits fondamentaux.

Cela n'est cependant pas suffisant pour les ONG défendant les migrants. La campagne Frontexit est une campagne lancée par 21 associations, des chercheurs et des individus issus de la société civile du Nord et du Sud de la Méditerranée visant à dénoncer les exactions commises par FRONTEX dans le cadre de son mandat. La campagne vise FRONTEX comme bras armé de l'Europe dans la lutte contre les migrants et veut informer le grand public sur les opérations de FRONTEX, qui seraient contraires aux droits de l'homme. Frontexit explique que a part des migrations internationales est restée stable ces 50 dernières années et que FRONTEX n'a pas lieu d'être. Le collectif demande ainsi pêle-mêle la transparence sur les mandats, les responsabilités et les actions de FRONTEX, la suspension des activités de l’agence identifiées comme contraires aux droits humains. De plus, cette campagne soulève de nombreuses questions fondamentales, notamment sur la responsabilité en cas d’atteinte aux droits fondamentaux lors des opérations de Frontex: est-ce l’agence, l’État où se déroule l’opération, ou encore l’État dont relèvent les gardes-frontières impliqués ?

Mais l'agence, que nous avons rencontré, a aussi apporté des réponses à ses critiques. Le service de presse de FRONTEX a tout d'abord souligné que l'agence manquait cruellement de moyen pour accomplir sa mission dans les meilleures conditions, qu'ils soient financiers ou législatifs. Cela est du à un blocage des Etats membres qui ne veulent pas abandonner une part de leur souveraineté concernant la surveillance des frontières extérieures. Car c'est la que le bât blesse. La responsabilité dans la crise des migrants et les nombreux incidents qui sont survenus est attribuée à l'agence, mais comme elle le souligne, elle n'est la qu'en soutien des Etats membres car le contrôle des frontières reste une prérogative nationale. De plus, FRONTEX affirme avoir fait de nombreux efforts envers plus de transparence notamment sur le respect des droits fondamentaux avec une avocate spécialiste des droits de l'homme employée à plein temps et qui doit approuver les actions entreprises. Les critiques dirigées contre elle font omission que 90% de ses opérations sont des opérations de sauvetages. Enfin l'agence se défend des critiques en expliquant que celles ci sont mal dirigées, allant même jusqu'à dire que « le nom Frontexit a été choisi car il sonne bien, même si la campagne n'a rien à voir avec FRONTEX ». De plus, elle affirme avoir accueilli sur ses navires des organisations humanitaires pendant une semaine pour suivre ses opérations. Au retour de celles-ci, ses plus virulentes critiques déclaraient que FRONTEX était une « organisation humanitaire, philanthropique ».

Cette rencontre a pu apporter des réponses mais a aussi soulevé des points de débat. L'agence est en grand besoin de réformes, de l'aveu même du service de presse. Mais de nombreux blocages se font à tout les niveaux. Tout d'abord, les associations voient dans une réforme de l'agence à qui on accorderait plus de moyens un danger encore plus grand pour le respect des droits des migrants. Mais le blocage le plus important vient des Etats membres. Comme évoqué plus haut, ceux-ci ne veulent pas voir un peu plus de leurs souverainetés disparaître au profit de l'UE. Cela est symbolisé par le cas de la Pologne, qui accueille les bureaux de FRONTEX à Varsovie. Depuis la création de l'agence, la Pologne a toujours refusé que l'agence bénéficie du même statut diplomatique que les autres organes européens, créant ainsi une zone grise sur la légitimité aux yeux de la loi de FRONTEX. Ainsi, Fabrice Leggeri, le directeur général de FRONTEX explique la difficulté d'une telle position par le risque que, du jour au lendemain, la Pologne décide la fermeture de l'agence. Cette position se retrouve dans la proposition de réforme, ou Varsovie s'oppose à la possibilité de FRONTEX de passer outre les Etats membres pour intervenir dans un pays, restant donc au bon vouloir de ceux-ci.

L'agence est donc prise entre plusieurs feux, entre son devoir à accomplir mais avec des moyens insuffisants et un cadre juridique défaillant. Et le principal souci, de l'aveu même de l'agence est que le contrôle des frontières au sens le plus strict du terme n'est pas une solution viable sur le long terme. Tant que la guerre qui ravage la Syrie continuera, les incidents, les critiques et les polémiques suivront.

SOURCES : http://www.ft.com/cms/s/0/4a09367c-a34c-11e5-bc70-7ff6d4fd203a.html

http://www.touteleurope.eu/actualite/qu-est-ce-que-l-agence-frontex.html

http://www.slate.fr/story/70227/frontex-frontieres-immigration-contestation

http://frontex.europa.eu/about-frontex/mission-and-tasks/