Le rapatriement : une question épineuse

La question du rapatriement reste un des points les plus sensibles du dossier. Le désaccord entre l’Union européenne et l’Union africaine, qui s’est fait ressentir lors du sommet des 29 et 30 novembre derniers entre les deux organisations, porte sur le consentement des migrants au retour dans leur pays d’origine. L’UE souhaite les contraindre à rentrer dans leur pays, tandis que l’UA ne veut entendre parler de rapatriement que s’il est consenti. Ce désaccord a même retardé de plusieurs jours la publication des conclusions du sommet UA-UE, qui a finalement retenu la proposition africaine.

Ebba Kalondo, porte-parole de Moussa Faki Mahamat, président de la Commission de l’Union africaine, a ainsi expliqué la position africaine : « Le paragraphe 73 sur le retour volontaire des migrants, c’est le plus important. C’est une question de droits de l’homme, on ne peut pas contraindre les gens à rentrer dans des pays où ils ne seront pas en sécurité ». En effet, nombre de migrants fuient des zones de guerre et/ou de famine, ou bien quittent des Etats sclérosés et gangrenés par la corruption et où l’absence d’opportunité encourage leur départ. Pour ces raisons, la politique de rapatriement risque de ne pas être aussi efficace qu’escompté, les migrants préférant bien souvent rester en Libye afin de gagner l’Europe que d’être rapatriés.

L’aide au développement comme solution ?

Interrogée sur les moyens mis en œuvre pour faire face à la crise, la cheffe du Service Européen pour l’Action Extérieure (SEAE) Federica Mogherini a expliqué que les services européens allaient travailler plus activement avec l’Organisation Internationale pour les Migrations (OIM), le Haut Commissariat des Nations unies pour les réfugiés (HCR) et l’UA afin de prévenir les atteintes aux droits de l’homme et qu’une importante aide financière sera également destinée au développement économique des pays d’origine des réfugiés : « La décision la plus importante prise à Abidjan n’est pas seulement la création de cette task force qui nous permettra de travailler ensemble et non pas les uns contre les autres, mais aussi et surtout le lancement d’un plan d’investissements privés, avec le soutien financier de l’UE, de 44 milliards d’euros pour des projets destinés à développer l’emploi dans les zones les plus fragiles de l’Afrique. C’est cela, la vraie réponse aux problèmes de sécurité et des migrations en Afrique. »

Toutefois, ce plan de développement s’inscrit dans la durée et les résultats ne se feront pas sentir avant des années. Les flux migratoires à destination de l’Europe - et les atteintes aux droits de l'homme qui en découlent - ne risquent donc pas de diminuer de sitôt. Il faut également que l’UE prenne des décisions efficaces à court terme, autre que le rapatriement des migrants, qui ne mettra pas un terme à la crise migratoire et humanitaire. Au vu des abus commis, il faut commencer par mettre fin aux accords conclus avec les garde-côtes libyens, qui, avec la bienveillance de l’UE, confinent les migrants afin de les empêcher de traverser la Méditerranée, jouant ainsi un rôle important dans ce trafic d’êtres humains. Il faut ensuite aider plus activement les Libyens à mettre en place un Etat stable et suffisamment fort pour faire respecter le droit international afin de répondre plus efficacement aux défis posés. L’aide européenne ne doit pas simplement être économique ; elle doit aussi être politique et logistique.

Sources :

  • http://fr.euronews.com/2017/12/04/federica-mogherini-l-ue-lutte-deja-contre-l-esclavage-en-libye
  • https://www.euractiv.fr/section/l-europe-dans-le-monde/news/le-retour-force-de-migrants-bloque-les-conclusions-du-sommet-ue-afrique/
  • http://www.lepoint.fr/monde/esclavage-en-libye-le-casse-tete-du-rapatriement-des-migrants-01-12-2017-2176504_24.php