La Commission européenne avait proposé en septembre 2023 aux États membres de l’Union européenne de renouveler l’autorisation du glyphosate — la substance active du Roundup, herbicide le plus utilisé dans le monde — pour dix années supplémentaires. Seules précautions avancées, la Commission recommande des « mesures d’atténuation des risques » aux alentours des zones pulvérisées, et d’apporter « une attention particulière » aux effets indirects sur l’environnement. Les États membres de l’UE avaient ensuite la charge de voter sur cette proposition.

Les Vingt-Sept ont tenté de se mettre d’accord, en vain, en octobre 2023 puis le 16 novembre 2023. Or, en l’absence de majorité qualifiée d’Etats-membres (65 %) pour ou contre la prolongation de l’autorisation de cette molécule, la décision revient ensuite légalement à la Commission qui était tenue d'adopter une décision avant le 15 décembre 2023, date d'expiration de la période d'autorisation actuelle.

Une substance "cancérogène probable" selon l’OMS

Le glyphosate, substance active de plusieurs herbicides avait été classé en 2015 comme "cancérogène probable" par le Centre international de recherche sur le cancer de l'Organisation mondiale de la santé. Á l'inverse, en juillet 2023, l'Autorité européenne de sécurité des aliments (Efsa) a indiqué n'avoir pas identifié de "domaine de préoccupation critique" chez les humains, les animaux et l'environnement susceptible d'empêcher l'autorisation de l'herbicide, tout en reconnaissant un manque de données. La Commission européenne s’est basée sur cet avis de l’Efsa pour prolonger jusqu’en 2033 l’autorisation du glyphosate dans l’Union européenne.

Une victoire pour les lobbies agricoles et agrochimiques

Sept pays, dont la France – première puissance agricole de l'UE –, l'Allemagne et l'Italie, se sont abstenus, selon des sources diplomatiques, tandis que 17 ont voté pour et trois s'y sont opposés (dont le Luxembourg). Une prolongation dénoncée par les écologistes au nom de la santé publique mais défendue par plusieurs d’Etat au nom de la « sécurité alimentaire ». Il semble que pour les Vingt-Sept, laisser la Commission européenne endosser seule cette décision leur évite une « guerre » avec les lobbies agricoles et agrochimiques…

S'il reste possible pour chaque Etat membre de restreindre, s'ils le souhaitent, l'utilisation de l'herbicide, ce type de décision doit néanmoins être étayé juridiquement. A ce jour, seul le Luxembourg a interdit le glyphosate… avant de voir sa décision retoquée à la suite d'un procès intenté par Bayer, propriétaire de Monsanto, premier producteur mondial de l'herbicide.

Le Parlement européen rejette la trajectoire de réduction des pesticides

Autre défaite pour les écologistes européens, le Parlement européen a rejeté, mercredi 22 novembre 2023, l’objectif de réduire de moitié l’utilisation des pesticides d’ici 2030 par rapport à la moyenne des années 2013 – 2017. Il s’agissait d’un projet de nouveau règlement européen sur la réduction des pesticides (SUR), proposé par la Commission européenne. La proposition prévoyait également que les produits phytopharmaceutiques considérés comme les plus dangereux voient leur utilisation baisser, eux, de 65 % à cette même échéance. Malgré un accord lors des discussions préalables en commission Environnement du Parlement, le texte a reçu 207 votes favorables contre 299 défavorables et 121 abstentions. Les élus du PPE, des groupes d’extrême droite mais aussi certains socialistes et libéraux se sont opposés à ce texte.