Le 4 décembre dernier, la Commission Européenne a décidé de débloquer 180 millions d’euros afin de faire face à la crise syrienne.
Le conflit meurtrier qui dure maintenant depuis presque quatre ans en Syrie a donné lieu à l’un des défis humanitaires les plus importants du XXIe siècle. En effet, depuis le début de la crise, on estime que près de la moitié de la population de la Syrie a été touchée (soit environ 11 millions de personnes). On compte plus de 191 000 syriens tués et au moins un million de blessés. Les déplacements de populations ont littéralement explosés avec 6.5 millions de déplacés à l’intérieur du Pays et plus de 3.2 millions de réfugiés dans les pays voisins. Ainsi au Liban, on estime à 1.1 million le nombre de réfugiés syriens et 630 000 en Jordanie. De même, la Turquie est particulièrement touchée par ces déplacements de population et on voit aujourd’hui se constituer dans tous ces pays des camps de réfugiés gigantesques. Selon Amnesty Internationale : « La Turquie et les États voisins (Égypte, Irak, Jordanie et Liban) abritent 97 % des réfugiés en provenance de Syrie » (1).
Devant la gravité de la situation, la commission a donc décidé de répartir 180 millions d’euros entre la Syrie et les pays accueillants des réfugiés syriens. L’Europe attribuera 41 millions d’euros à l’assistance de la population syrienne, 66 millions d’euros seront destinés aux réfugiés syriens et aux communautés d’accueil en Jordanie et 73 millions d’euros aux communautés d’accueil au Liban (2). A la suite de la visite d’un camp de réfugié en Turquie par la Haute Représentante de l'Union pour les affaires étrangères et la politique de sécurité Federica Mogherini et M. Christos Stylianides, commissaire chargé de l'aide humanitaire et de la gestion des crises, l’Union a décidé de débloquer 10 millions d’euros supplémentaires pour la Turquie qui fait non seulement face à des flux de population en provenance de Syrie mais aussi d’Irak (3).
La majorité des fonds débloqués par l’Union pour venir en aide aux réfugiés syriens viseront à offrir aux jeunes syriens des conditions d’éducation adéquates. A travers cet objectif, l’Union tente de favoriser le développement sur le long terme de ces populations.
A côté de ces aides financières, l’UE s’est prononcée en faveur du plan de l’ONU visant à geler les combats afin de permettre l’acheminement de l’aide humanitaire des zones comme la ville d’Alep. Federica Mogherini a jugé que la réussite de ce plan était «cruciale pour des raisons politiques, pour des raisons de sécurité, pour les réfugiés … et aussi comme symbole, de ce que la Syrie peut être et de ce que la Syrie ne doit pas être » (4).
Il semble donc qu’on puisse parler d’un véritable consensus au niveau l’Union européenne sur la nécessité d’intervenir en Syrie. Cette idée que l’Union a un rôle à jouer dans la résolution de la crise Syrienne a d’ailleurs été exprimée très clairement par Mme Mogherini qui déclarait le 4 Décembre dernier : « Nous sommes déterminés à jouer pleinement notre rôle et à apporter une solution politique durable à cette crise régionale ».
Si l’on ne peut remettre en cause la volonté de l’Union d’aider la population syrienne, on peut cependant se demander si elle se donne les moyens de ses ambitions. Depuis le début du conflit, la Syrie et ses institutions sont complètement dévastées. Les combats opposent les forces de Bachar El Assad, de la résistance et divers groupes armés ayant des prétentions sur la Syrie. On pense notamment au groupe État Islamique dont l’un des objectifs est de faire disparaitre les frontières entre la Syrie et ses voisins, comme l’Irak ou la Turquie ce qui aurait pour conséquence la modification des rapports de force sur le terrain.
On ne peut s’empêcher de penser que les pays de l’occident payent aujourd’hui le prix de quatre années d’immobilisme qui résonnent dans les conséquences de la crise syrienne où la stabilité de toute la région est menacée. Mais cette réponse est-elle suffisante pour mettre fin à la situation en Syrie ? Le déblocage important de fonds à destination des populations syriennes ne devrait-il pas s’accompagner d’une prise de position diplomatique forte et assumée pour mettre fin à un conflit qui gagne toujours en complexité et dont les conséquences s’étendront surement bien au-delà des frontières de la Syrie et sa région.