1087309-1382731.jpgLe 24 novembre dernier, un incident a ravivé les flammes d'un conflit qui semblait éteint. En effet, la semaine dernière, un chasseur-bombardier russe de type Sukhoï SU-24 a été abattu par deux F-16 turcs au nord-ouest de la Syrie. Pour ces derniers, l’avion russe a violé leur espace aérien malgré les nombreux avertissements radios, ce que les autorités russes démentent formellement. Selon l’état major russe, il n’y a pas eu de contact radio, puisqu aucune intrusion dans l’espace aérien turc. Et c’est là que les choses se corsent. L’avion s’est en effet écrasé à 4 kilomètres sur le territoire syrien, alors qu’il volait à 6 000 mètres d’altitude à une distance d’1 kilomètre de la frontière selon la déclaration du Président Poutine. Cependant un, plutôt faible, témoignage américain s’est fait entendre certifiant l’émission de contacts radios turques sur des canaux ouverts. L’incident a notamment provoqué la mort de deux soldats russes, un des pilotes du SU-24 et un soldat en opération de sauvetage des pilotes, abattus tous deux depuis le sol.

A la question de savoir qui a tord ou raison, il est dur de trancher. Mais c’est la colère des deux dirigeants et la mise en place presque automatique du jeu des alliances qui ont fait trembler les dirigeants du monde entier, et notamment ceux de l’Union européenne qui se retrouve en porte-à-faux entre ses deux voisins. Alors que les autorités russes considèrent cette attaque comme « un coup de poignard dans le dos » et ont coupé toute coopération sur le terrain; la Turquie a, elle, fait valoir son droit de défense de l'espace aérien en saisissant les Nations Unies et l'OTAN, dont le secrétaire Jens Stoltenberg, a réaffirmé le soutien tout en préconisant l’ouverture du dialogue. C’est aussi le cas des États Unis, leur allié de longue date au sein de l'organisation qui ont exprimé leur soutien à la Turquie dès le soir même de l'incident avec une déclaration du président Obama. Un soutien qui peut s’avérer fâcheux à un moment où le président français François Hollande avait, avec peine, réussi à convaincre la Russie d’entrer dans une coalition militaire contre l’État islamique (EI).

Face à ce clivage, c'est encore une fois un camp occidental qui semble se former contre la Russie. En effet, rappelons que dernièrement la Russie a été condamnée par la plupart des chefs d’états occidentaux pour l'annexion de la Crimée et sa position dans le conflit ukrainien. Les sanctions économiques de plusieurs pays ont placé plus ou moins ce pays dans une position d'isolement internationale. L’opposition avec l'ouest continue sur le sujet syrien dans lequel, Poutine, l'un des seul à affirmer son soutien à Bashar al-Assad, a finalement décidé d'intervenir, s'opposant ainsi à la stratégie militaire de la coalition occidentale, considérée comme inefficace sinon inexistante par les russes.

Cependant, face à la formation de deux camps distincts, l'Union européenne s'est cette fois démarquée par sa neutralité et a décidé de se placer en arbitre. La chef de la diplomatie européenne Federica Mogherini s’est rangé au coté que les dirigeants e chefs d'organisations internationales dans un appel à la discussion et à la désescalade. Mais à la différence de ces derniers, qui indiquent suivre de près les événements, l’Union européenne a montré à travers sa porte parole qu’elle disposait de vrais moyens de pression pour faire respecter la paix, notamment envers la Turquie qui doit rentrer dans une nouvelle phase de discussion concernant son entrée dans l’Union comme l'a confirmé la rencontre du 30 novembre entre le premier ministre turc et les dirigeants européens. Mais si l'escalade semble avoir été évitée et la paix maintenue, il est certain que l'action militaire en Syrie risque de pâtir de ces tensions parmi la coalition. Cet incident, révélateur d'une alliance à l'équilibre fragile, nous rappelle que malgré les nouveaux rapports de force plutôt orientés nord/sud qui semblent se mettre en place, les anciens ne sont pas si vite oubliés.

Sources :

http://www.tdg.ch/monde/Avion-abattu-Turcs-et-Russes-en-chiens-de-faience/story/21255288

http://www.lemonde.fr/international/article/2015/11/24/un-avion-de-combat-s-ecrase-pres-de-la-frontiere-turque_4816160_3210.html

http://www.israelnationalnews.com/News/News.aspx/203875#.VlWiDHYvfcs

https://euobserver.com/opinion/131282

http://www.france24.com/fr/20151005-syrie-russie-pourquoi-russes-frappes-ei-jihadistes-rebelles-terroristes-assad-carte

image : www.alterinfo.net/Russie-Turquie-alliance-tactique-ou-partenariat-strategique_a25412.html