C’est avec cet argument que Bloom, ONG française militant pour la préservation des océans et des espèces maritimes, a accusé la Commission. À cause de l’attitude de celle-ci, les administrations néerlandaises ont accordé beaucoup de licences de pêche aux Pays Bas, mais elles se sont toutes révélées illégales. C’est pourquoi l’ONG Bloom avait, en octobre 2017, déposé une plainte contre ce pays. Face à l’inaction de la Commission, l’ONG n’a pas renoncé. Elle a saisi, le 6 novembre 2018, la médiatrice européenne, Emily O’Reilly, pour qu’elle constate la mauvaise administration des dossiers de la pêche par Bruxelles.
La pêche électrique, initialement interdite en 1998, a ensuite été autorisée par Bruxelles, en 2006, au titre de la recherche scientifique et expérimentale, de l’innovation et de meilleures pratiques. Il est donc possible de déroger à l’interdiction dans la partie sud de la mer du Nord, à condition que les flottes des Etats membres équipées pour la pêche électrique soient limitées à 5%. Or, Bloom a prouvé qu’aujourd’hui ce sont 84 les navires de pêches néerlandais qui sont dotés d’électrodes, ce qui correspond à 40% de la flotte. Ce chiffre va bien au-delà de ce qui est permis. En janvier 2018, le Parlement Européen a voté contre la pêche électrique, en faveur de sa totale interdiction en Europe. La Commission s’est, de son côté, opposée à l’interdiction.
Par conséquent, il est évident que les institutions européennes ne facilitent pas le processus d’interdiction définitive, qui est déjà présente dans d’autres pays (Etats Unis, Chine, Brésil). En effet, il y a un véritable désaccord entre le Parlement et la Commission Européenne. Le Conseil de l’Union a aussi son mot à dire, mais les ministres de la pêche sont influencés par les lobbys hollandais de la pêche électrique. Les lobbys des industriels sont si forts que les Etats membres ne se sont pas prononcés défavorables à la pêche électrique.
Cependant, durant le mois de juin beaucoup de ports ont été bloqués dans toute l’Europe pour protester contre la pêche électrique : en Belgique, en France, en Allemagne, au Royaume-Uni, en Irlande, en Italie et même aux Pays-Bas.
Ce type de pêche a des conséquences dramatiques, car en plus de détruire l’écosystème marin en exposant les ressources à un énorme risque, il cause la faillite des pêcheurs artisans.
Le chalut est un filet qui est positionné au fond de la mer, équipé d’électrodes qui envoient des impulsions électriques aux poissons. Ceux-ci sont tout de suite immobilisés et remontent vers la surface. Ensuite, ils sont capturés par le filet. Il a été démontré que la quantité de poissons dans la mer et dans l’océan a diminué de centaines de tonnes depuis l’utilisation de cette technique, car souvent les poissons ayant subi une charge électrique ne peuvent plus se reproduire.
L’argument que les pêcheurs néerlandais utilisent pour se défendre est celui du carburant : la pêche électrique permet d’en consommer moins, car le moteur du bateau tourne à plus faible régime. Ils s’opposent à ce que les poissons soient blessés par les électrodes, alors qu’un institut de recherche néerlandais a découvert qu’entre 50 à 70% des poissons pêchés par impulsion ont des blessures. Les néerlandais, avec leur technique, sont en train de faire disparaître une grande partie des ressources poissonnières, notamment les soles, et les pêcheurs des autres pays comme la France n’arrivent plus à gagner leur vie de leur métier.
Il ne reste plus qu’à attendre de voir comment la situation va évoluer dans les prochains mois.
Sources :
Le Figaro, "La pêche électrique soulève des tensions en Europe"
Le Figaro, "Le Parlement européen s'oppose à la pêche électrique"
BFMTV, ""Dupin Quotidien": L'Europe a-t-elle financé illégalement la pêche électrique?"
Le Parisien, "Pêche électrique : une ONG demande des comptes à Bruxelles"
Le Parisien, "Pêche électrique : le parlement européen vote pour son interdiction"