Pologne_-_CEDH.jpg Crédit : Toms Kalnins

Un nouveau défi lancé contre la justice européenne

« La Cour constitutionnelle se débarrasse d’un jugement de la CEDH (Cour européenne des droits de l’homme) qui violait notre système judiciaire », a tweeté le ministre adjoint de la Justice polonais, Sebastian Kaleta qui considère que l’article en question conférait des pouvoirs illégaux à la Cour européenne des droits de l’homme pour évaluer la légalité de l’élection des juges de la Cour constitutionnelle polonaise. Une décision qui répond à la publication d’un arrêt rendu le 7 mai 2021 dans le cadre de l’affaire Xero Flor v Poland par la Cour européenne des droits de l’homme qui avait alors constaté une violation du droit à un procès équitable et du droit à un tribunal établi par la loi. Elle avait à ce moment-là précisé que l’élection des juges de la Cour constitutionnelle, qui remontait à 2015, s’était effectuée en ayant recours à une procédure irrégulière. De ce fait, la Cour européenne des droits de l’homme avait conclu que la Cour constitutionnelle était illégale. Force est de constater qu’aujourd’hui la Pologne n’accepte toujours pas cette déclaration. De plus, le gouvernement d’Andrzej Duda considère que le champ d’application de la Convention des droits de l’homme est trop vaste, laissant un pouvoir trop important aux juges de Strasbourg. Cependant, il faut rappeler que la CEDH créée en 1950 reste un symbole très fort de la volonté d’une Europe unie au lendemain de la Seconde Guerre mondiale. Elle remplace la force armée par le droit et entend restreindre les Etats violant certaines normes impératives. En ce sens, remettre en cause la CEDH revient à piétiner toute la civilisation européenne qui s’est reconstruite après la guerre. Dans le cas présent, cet événement implique donc des conséquences sérieuses pour les droits des Polonais.

Le Conseil de l’Europe s’inquiète

Face à ce manquement aux principes fondateurs du Conseil de l’Europe, la secrétaire générale de l’institution, Marija Pejčinović Burić, a rappelé que « les 47 États membres du Conseil de l’Europe, dont la Pologne, se sont engagés à garantir les droits et les libertés énoncés dans la Convention européenne des droits de l’homme . Ils sont aussi tenus d’exécuter les arrêts de la Cour européenne ». Plus récemment, en décembre 2021, dans une lettre adressée au ministre polonais des Affaires étrangères, elle a demandé officiellement à la Pologne d’expliquer de quelle manière elle compter appliquer ses obligations au titre de la Convention européenne des droits de l’homme. Toutefois, la marge de manœuvre du Conseil pour restreindre la Pologne reste limitée avec des sanctions qui demeurent symboliques et généralement peu contraignantes.

Sources :

Site du Conseil de l’Europe - https://www.coe.int/fr/web/portal/-/council-of-europe-secretary-general-reacts-to-today-s-judgment-from-poland-s-constitutional-tribun-1

Communiqué de presse du Conseil de l’Europe - https://search.coe.int/directorate_of_communications/Pages/result_details.aspx?ObjectId=0900001680a4cd2b

Euractiv - Le Conseil de l’Europe veut des réponses de la Pologne suite à la décision controversée de sa Cour constitutionnelle, consulté le 28 décembre 2021, https://www.euractiv.fr/section/justice-affaires-interieures/news/le-conseil-de-leurope-veut-des-reponses-de-la-pologne-suite-a-la-decision-controversee-de-sa-cour-constitutionnelle/

Le Monde - Pologne : la Convention européenne des droits de l’homme jugée incompatible avec la Constitution, consulté le 28 décembre 2021, https://www.lemonde.fr/international/article/2021/11/24/pologne-la-cour-constitutionnelle-juge-la-convention-europeenne-des-droits-de-l-homme-incompatible-avec-sa-constitution_6103459_3210.html