Le 28 novembre 2024, le Parlement européen a rejeté une résolution non contraignante visant à renforcer la réglementation sur le tabac et les produits émettant des aérosols, comme les cigarettes électroniques. Ce rejet, avec 378 voix contre, illustre les divisions persistantes entre les groupes politiques européens. En effet, alors que la proposition initiale était soutenue par les 4 grandds groupes politiques du parlement européen, seul les Conservateurs et Réformistes (ECR) et une partie du Parti Populaire Européen (PPE) ont finalement soutenu les amendements visant à différencier ces produits du tabac traditionnel, pensant qu’ils pourraient aider à réduire le taux de tabagisme en Europe.
Le rejet de cette résolution peut donc porter à confusion, d’autant plus que l'Organisation mondiale de la santé (OMS) met en garde contre les risques sanitaires liés à ces produits, soulignant le fait que « plus de 8 millions de personnes meurent prématurément à cause du tabagisme chaque année ». Chiffres étant dans certains cas favorisé par le marketing ciblé envers les jeunes, une population particulièrement vulnérable.

Une législation controversée

La résolution proposait d'étendre les interdictions de fumer aux espaces extérieurs et d'inclure les cigarettes électroniques et le tabac chauffé dans les réglementations existantes. Cependant, des amendements introduits par les Conservateurs et Réformistes européens (ECR) ont affaibli le texte, conduisant des groupes comme les Socialistes et Démocrates (S&D) et les Verts à rejeter ce qu'ils considéraient comme une mesure édulcorée. La volonté de ces derniers visant à différencier la réglementation des e-cigarettes et autres produits du tabac chauffés de celle du tabac traditionnel n’ont pas convaincue. D’après certains membres du PPE, « Les cigarettes électroniques peuvent aider certains fumeurs à abandonner la cigarette ». Mais cette position occulterait les dangers du tabagisme passif, responsable de 10 000 décès annuels en Europe, ainsi que les effets toxiques des vapeurs émises car contrairement aux idées reçues, cette fumée secondaire peut être quatre fois plus toxique que la fumée inhalée par le fumeur. Par exemple : La présence de nitrosamines (cancérigène) est 10 à 30 fois plus importante de même que l’amoniac (une toxine à base de composants irritants) voit son taux augmenté de 15 à 30 fois.

C’est pour cela que les Etats Européens ont depuis plusieurs années commencés à adopter des lois restrictives et des législations antitabac ayant déjà montré leur efficacité. Par exemple, la loi Veil en France de 1976 a permis de stabiliser la consommation de tabac grâce à des mesures strictes sur la publicité. Plus récemment, des pays nordiques comme la Suède ont réussi à réduire la prévalence du tabagisme à des niveaux record, atteignant seulement 15 % de fumeurs (quotidiens et occasionels) en 2019. Bien sûr, chaque législation varie d’un pays à un autre et certains Etats sont plus stricts que d’autres.  

Un échec révélateur des priorités politiques

Malgré son caractère non contraignant, cette résolution aurait pu fournir un cadre permettant d'harmoniser les efforts entre les États membres et mieux protéger les populations à risque, tel que les enfants et les femmes enceintes. Son rejet met alors en évidence un dilemme entre santé publique et compromis politique car les eurodéputés semblent divisés entre l’urgence de réduire les cancers liés au tabac et la pression de certains lobbys économiques.

Une question essentielle peut donc être mise en avant : l'Union européenne a-t-elle réellement les moyens de mettre en place une politique de santé publique ambitieuse et cohérente ? En effet, si certains États, tel que le Royaume-Uni, prennent des initiatives novatrices ( à l’image de leur projet visant à interdire la vente de tabac aux générations nées après 2009) , l’absence de coordination européenne risque de limiter l’impact global et son influence à l'étranger.

 Sources :

  • Euractiv. (2024). Tabac : les eurodéputés rejettent la résolution sur les environnements sans fumée. Consulté à l’adresse : https://www.euractiv.fr/section/sante/news/tabac-les-eurodeputes-rejettent-la-resolution-sur-les-environnements-sans-fumee-ni-aerosols/
  • Génération sans tabac. (2024). Division au Parlement européen : l’échec d’une résolution pour des environnements sans fumée. Consulté à l’adresse : https://www.generationsanstabac.org/fr/actualites/division-au-parlement-europeen-lechec-dune-resolution-pourdes-environnements-sans-fumee/
  • Euractiv. (2024). Après le rejet de la résolution sur le tabac, les eurodéputés se renvoient la faute. Consulté à l’adresse : https://www.euractiv.fr/section/sante/news/apres-le-rejet-de-la-resolution-sur-le-tabac-les-eurodeputes-se-renvoient-la-faute/
  • Statista. (2021). Prévalence du tabagisme chez les jeunes européens (15-24 ans). Consulté à l’adresse : https://fr.statista.com/infographie/6521/prevalence-du-tabagisme-chez-les-jeunes-europeens/
  • Statista. (2023). Évolution de la proportion de fumeurs dans une sélection de pays. Consulté à l’adresse : https://fr.statista.com/infographie/30103/evolution-de-la-proportion-de-fumeurs-dans-une-selection-de-pays/
  • Vivami. (n.d.). Interdiction de fumer en Europe. Consulté à l’adresse : https://fr.vivami.co/blog/interdiction-de-fumer-en-europe