”L’Europe, quel numéro de téléphone ?” est la fameuse phrase qu’avait utilisé en 1970, Henry Kissinger (ancien secrétaire d’Etat américain) pour critiquer le manque de cohésion et de visibilité de l’Union européenne sur la scène internationale. Mais depuis lors, l’Union européenne s’est dotée en décembre 2010 d’un service diplomatique, le Service Européen d’Action Extérieure (SEAE), visant d’une part à assurer la cohérence et la coordination de la politique étrangère de l’UE, et d’autre part à renforcer son influence politique et économique dans le monde. Au bout du combiné, on peut désormais entendre la « voix » de l’Europe, symbolisée par Catherine Ashton.
Mais en réalité, ce n’est pas une seule voix mais plutôt trois voix qui se font entendre : Lady Ashton (Haute représentante de l’UE), Herman Van Rompuy (président du Conseil européen) et José Manuel Barroso (président de la Commission européenne).
Ainsi, malgré le rassemblement des différents services de la Commission et du Conseil en charge des affaires extérieures dans une même institution, le SEAE, la méfiance et les rivalités entre les anciens membres de la Commission, qui sont majoritaires, et ceux du Conseil persistent.
De plus, les grands Etats membres, au détriment souvent des plus petits, cherchent à placer leurs pions à des postes clés afin de jouer un rôle important sur le nouvel échiquier diplomatique. La surreprésentation des Britanniques au sein du SEAE a donc été vivement critiquée.
Les questions qu’on peut alors se poser sont « Quelle est la portée de cet effort de faire fonctionner ensemble deux bureaucraties s’il n’y a pas derrière un pouvoir politique fort ? S’il s’agit d’un nouvel instrument, la question est de savoir qui est aux commandes, et pour quoi faire ? » Le manque d’implication de la baronne pour sa mission et ces apparitions occasionnelles en conférence de presse ne contribuent donc pas à définir clairement le rôle du SEAE et ses actions et à véhiculer une bonne image du servie. La répartition des rôles entre la Commission, le Conseil et le service diplomatique de l’UE reste alors encore flou. Joindre le SEAE est par conséquent une mission qui se révèle hautement difficile.
Ainsi, selon un haut fonctionnaire du SEAE « Le véritable enjeu est de parvenir à créer une culture diplomatique commune, un esprit de corps devant assurer la synthèse entre les approches communautaires (Commission) et intergouvernementales (Conseil et Etats membres). Les compétences entre ces deux institutions sont totalement différentes : d’un côté nous avons des techniciens, de l’autre des analystes politiques. Le SEAE doit être le point de rencontre entre ces deux cultures, afin de susciter des synergies et ainsi de doter l’UE d’une véritable ‘approche globale’ ».
Il n’y aura donc pas de véritable « politique étrangère commune » sans la volonté des Etats membres et de la Commission à créer une unité politique afin de redéfinir un projet interne de l’UE pour « l’action extérieure » dans une approche globale, aussi bien civile que militaire.
Alison et Zoitsa
Sources : Http://www.lemonde.fr/idees/article/2011/12/15/seae-un-numero-de-telephone-contre-un-forfait-bloque_1618253_3232.html