Le 13 Novembre 2015, l'Europe a été frappée par des attentats terroristes. Ces attentats perpétrés à Paris, et revendiqués par l’État Islamique ont à ce jour fait 130 morts. Le jour même de ces tristes événements, la France a pris la décision de rétablir temporairement le contrôle d'identité à ses frontières. Une décision qui n'a jamais été appliquée par les pays européens touchés par des attentats ces 15 dernières années. Cette mesure suspend donc pour une durée indéterminée la libre-circulation au sein de l'Espace Schengen institué par des accords signés le 14 juin 1985 (entrée en vigueur le 26 mars 1995). Cet espace rassemble actuellement 26 pays. (cf carte ci-dessous).
Les 26 états de l'Espace Schengen. (Sources : http://www.assemblee-nationale.fr/14/rapports/r1785-6.gif)
La France n'est pas la première à suspendre la libre-circulation à ses frontières. Depuis plusieurs mois d'autres pays européens ont appliqué cette mesure concernant l'afflux de migrants des pays du Moyen-Orient (essentiellement de la Syrie), tels que la Hongrie ou encore l'Allemagne. Ces prises de décision ont mis à mal l'Espace Schengen dont certains chefs d'état tels qu'Angela Merkel ont déjà émis l'hypothèse d'une fin proche. Les pays qui rétablissent temporairement un contrôle à leurs frontières se trouvent dans la légalité et n’enfreignent aucune loi. Effectivement les accords de Schengen prévoient cette situation dans le cas où le pays concerné se trouve dans une situation de menace pour la sécurité et l'ordre public. La France ne s'en tenant pas à cette seule loi, et pointant du doigt le manque de cohésion et de coopération entre les états européens en matière de sécurité intérieure a immédiatement exprimé le souhait que se tienne une discussion européenne autour de la question de la protection des frontières et de la libre-circulation. Ainsi le 20 novembre 2015 s'est tenu un Conseil extraordinaire Justice et Affaires Intérieures réunissant les 28 ministres des affaires étrangères de l'UE. La demande française semble avoir été entendue, puisque selon Bernard Cazeneuve, ministre de l'intérieur français « La Commission européenne présentera d'ici la fin de l'année une proposition de réforme du Code Frontières Schengen »*. Cette réforme concerne essentiellement les frontières extérieures de l'espace, avec un contrôle systématique de toutes les personnes entrantes et sortantes. Néanmoins rien ne semble évident car les pays se situant dans les zones périphériques et donc les plus exposés ne sont pas les mieux équipés et préparés. Il y a ainsi d'importants manques de moyens aux postes frontières grecs à titre d'exemple.
De plus la France a implicitement exprimé le souhait de maintenir un contrôle à ses frontières autant de temps que la menace terroriste sera présente sur son territoire. Une durée donc indéterminée et pouvant dépasser la durée de 6 mois maximale autorisée par les accords de Schengen (2 ans en cas d'incapacité d'un Etat à contrôler ses frontières extérieures). Si certains saluent cette décision au nom d'un renforcement de la sécurité, d'autres y voient un véritable affront fait à l'un des piliers de l'UE à savoir la libre-circulation. Néanmoins ce qui semble le plus inquiétant est de savoir si cette résolution n'entraînerait pas de fait l'inutilité de l'espace Schengen, alors même que des voix s'élèvent en pointant du doigt les faiblesses d'un tel système. Ainsi le député européen écologiste belge Philippe Lamberts souligne une possible inefficacité du système face aux stratégies terroristes car selon lui « Les terroristes ne sont pas stupides. Ils pourront toujours trouver des passages en rase campagne pour se rendre en France »*.
L'avenir de l'Espace Schengen sans être pour le moment profondément remis en cause, semble au vu des derniers événements incertain. Néanmoins, en coulisse s'organisent de possibles réformes de la libre-circulation en Europe avec un potentiel remaniement de la zone Schengen. Les Pays-Bas dessinent le projet d'un mini-Schengen réduit au territoire du Benelux, de l'Allemagne et de l'Autriche. Un autre projet serait de faire sortir la Grèce de la zone de libre-circulation, pays n'appliquant pas assez sérieusement le contrôle à ses frontières et ainsi permettre à des pays mieux organisés dans ce domaine d'assurer le contrôle des entrées et sorties de la zone. La Suède quand à elle a émis la volonté d'instaurer des contrôles de passeports biométriques aux frontières de Schengen.
Sources :
- http://www.publicsenat.fr/lcp/politique/terrorisme-vers-fin-l-espace-schengen-1133939 20/11/2015
http://www.touteleurope.eu/actualite/schengen-la-carte-des-controles-aux-frontieres-nationales.html 23/11/2015
http://www.lefigaro.fr/international/2015/11/19/01003-20151119ARTFIG00325-la-france-met-l-europe-et-schengen-sous-haute-tension.php 20/11/2015
http://www.latribune.fr/economie/union-europeenne/la-montee-du-terrorisme-pousse-l-europe-a-renforcer-ses-frontieres-523966.html 20/11/2015