''Article_3_-_HANDOUT_AFP.jpg Le président turc Recep Tayyip Erdogan, mercredi 23 décembre à Istanbul. - AFP''

Alors que les relations entre le Conseil de l’Europe et la Turquie sont déjà tendues, cette décision ne va pas dans le sens de la réconciliation : le mardi 23 novembre, la CEDH a condamné la Turquie pour la détention « arbitraire » de 427 magistrats, après la tentative de putsch manquée du 15 juillet 2016. Le président Erdoğan en avait profité pour mener une purge dans l’administration, l’armée et les milieux intellectuels. « Cette insurrection est une bénédiction d’Allah, elle nous aidera à purger l’armée » avait-il déclaré le lendemain à son arrivée à Istanbul.

Violation du “droit de la liberté”

Ces magistrats, juges ou procureurs de plusieurs cours nationales, avaient été arrêtés et détenus pour « suspicion d’appartenance au FETO », l’Organisation terroriste des partisans de Fethullah accusée d’avoir organisé le coup d’État. En parallèle, 2 847 magistrats et 3 000 militaires avaient été révoqués par décret, pour les mêmes soupçons.

Les sept juges de la CEDH chargés de l’affaire ont considéré à l’unanimité que la Turquie n’avait pas respecté leur « droit de la liberté », garantie par la Convention européenne des droits de l’homme et signée par la Turquie. La Cour a condamné le pays à verser 5 000 € de dommage moral à chacun des magistrats détenus.

Au-delà de cette condamnation, plusieurs dossiers restent d’actualité entre la Turquie et la CEDH. L’homme d'affaires et opposant Osman Kavala est toujours détenu depuis octobre 2017, pour ses engagements politiques, malgré les demandes de libération formulées par le Conseil de l’Europe. Dans le viseur du gouvernement turc depuis 2013 et sa participation au mouvement Gezi contre Erdogan alors premier ministre, il avait également participé à la commémoration du centenaire du génocide arménien en 2016 et milité pour le boycott du référendum pour le renforcement des pouvoirs d’Erdogan en 2017.

Personae non gratae

En 2019, un arrêt de la CEDH avait demandé sa « libération immédiate », sans succès, bien que les traités signés par la Turquie l’y obligent. Le 3 décembre, le Conseil de l’Europe a alors entamé une procédure contre la pays en vue d’éventuelles sanctions. C’est seulement la deuxième fois qu’une procédure similaire est entamée, après celle contre l’Azerbaïdjan en 2017.

La Communauté Internationale s’est également positionnée aux côtés du mécène turc. En octobre dernier, dix ambassadeurs en Turquie, dont celui de la France, avaient lancé un appel en faveur de sa libération. Une déclaration à laquelle Erdogan n’a pas tardé à répondre, avec véhémence : « J’ai ordonné à notre ministre des Affaires étrangères de régler au plus vite la déclaration de ces dix ambassadeurs comme personae non gratae » a-t-il déclaré lors d’un déplacement au centre de la Turquie le samedi 23 octobre. Pour l’instant, aucune mesure concrète n’a suivi ces menaces.