Tout d'abord, définissons ce qu'est un "golden visa".
C'est un titre de séjour accordé par un pays en contrepartie d'investissement important, souvent dans l'immobilier. La pratique est en vogue en Europe et permet même d'obtenir la nationalité européenne, on parle alors de « golden passport ». Les conditions d'accès sont à la charge des pays. Ainsi au Portugal, le minimum à investir dans l'immobilier est de 280 000E. Il faut ensuite passer 7 jours par an dans le pays et au bout de 5 ans la nationalité est accordée. La Grèce possède le processus le plus rapide: après un investissement de minimum 500 000E, vous pouvez espérer obtenir un titre de séjour dans les deux mois.
On a aussi observé cette pratique en Espagne, en Lettonie, en Ireland, à Malte, en Bulgarie ou à Chypre notamment.
A l'origine, pour ces pays majoritairement d'Europe du sud, cette politique était un moyen d'attirer les investisseurs après la crise financière de 2008 qui avait dévasté leur économie.
Or, si cet argument est défendable, la motivation des bénéficiaires est, elle, clairement discutable. En effet, l'enquête menée par le journal Al-jezeera concernant Chypre révèle que de nombreuses personnalités recherchées, notamment pour corruption ou blanchiment d'argent ont ainsi pu acquérir un passeport européen. Rappelons qu'une fois la nationalité accordée, cela permet au bénéficiaire de circuler facilement au sein des 27 pays membres.
Parmi les cas douteux, on peut citer les oligarques russes Alexei et Dmitry Ananyev, soupçonnés de corruption, ou l'iranien Maleksabet Ebrahimi, visé par une notice rouge d'Interpol.
A Chypre, de nombreux fonctionnaires, dont le ministre de l'intérieur chypriote, auraient ainsi facilité des transactions plus que douteuses. Le passé judiciaire des candidats n'auraient ainsi pas été vérifié ou délibéremment ignoré.
Devant le scandale, et dans un contexte de guerre en Ukraine, la Commission européenne a tranché et invité «instamment les États membres à abroger immédiatement tout programme de citoyenneté par investissement existant ». Chypre a depuis abandonné son programme admettant que des « erreurs avaient été commises » et retiré la nationalité chypriote à 39 personnes. Le petit État méditerranéen aura tout de même collecté plus de 7 milliards d'euros grâce à cette politique.
Aujourd'hui, la plupart des pays concernés ont relevé leurs exigeances et souscrit aux demandes de la Commission, reste Malte qui malgré les multiples relances de Bruxelles refuse d'abandonner cette politique. Qu'à cela ne tienne, la Commission européenne a déposé un recours le 29 septembre 2022 devant la cour européenne de justice estimant la pratique contraire au traité de l'Union européenne et demandant donc son arrêt.
Sources
https://immobilier.lefigaro.fr/article/chypre-met-fin-aux-golden-visas-accordes-aux-investisseurs-immobiliers_82ac8a70-0d6d-11eb-ac2a-a59351ff39c8/#container-comments
https://www.aljazeera.com/news/2020/8/23/exclusive-cyprus-sold-passports-to-criminals-and-fugitives
https://www.euronews.com/travel/2022/10/13/what-is-a-golden-visa-and-why-are-some-countries-giving-them-up-for-good
https://www.liberation.fr/international/europe/ces-visas-dores-qui-protegent-les-oligarques-russes-en-europe-20220306_SZEY57R2SNFCTBAZD6GWJDOH5U/
https://fr.euronews.com/2022/08/22/fraude-aux-passeports-dores-une-enquete-incrimine-le-ministre-de-linterieur-chypriote#:~:text=Un%20rapport%20accablant%20de%20la,d%27obtenir%20la%20nationalit%C3%A9%20chypriote.
https://www.land.lu/page/article/228/339228/FRE/index.html
https://ec.europa.eu/commission/presscorner/detail/fr/IP_22_5422