Ce lundi, plus de 32 millions de Congolais étaient appelés à voter pour élire leur président et renouveler l’assemblée nationale. Dans cette ancienne colonie belge indépendante depuis 1960, c’est la première fois que le gouvernement organise les élections, les premières élections libres de 2006 ayant été organisées sous l’égide des Nations Unies. Parmi les 11 candidats, les congolais étaient amenés à choisir entre le président sortant Joseph Kabila, et son opposant “historique” Etienne Tshisekedi. Joseph Kabila occupe le poste de président depuis l’assassinat de son père Laurent Désiré Kabila pendant la deuxième guerre du Congo en 2001. Etienne Tshisekedi, 79 ans, revient à Kinshasa après trois années d’absence, frais comme un gardon, et convaincu de sa future victoire.
L’Union Européenne a, pour l’organisation de ces élections, déboursé la somme de 35 millions d’euros, et 12 millions restent encore à être versés. A travers le fond de soutien des Nations Unies, des pays européens tels que les Pays-Bas, la France, l’Espagne, la Belgique, le Royaume-Uni, l’Italie et la Suède ont aussi participé. Ces versements font partie d’une aide globale, dont 253 millions versés en 2010, de l’UE, faisant ainsi de la République Démocratique du Congo le premier bénéficiaire de FED (Fonds européen de développement) qui régit l’aide communautaire au développement des 77 Etats de l’ACP (Afrique, Caraïbes, Pacifique). Le service européen d'action extérieure (SEAE) a envoyé une mission d’observation électorale, à la demande de la RDC. L’UE a également investit dans la réforme de l’armée et la police à hauteur de 19 millions d’euros. Elle a aussi axé son action sur la gouvernance, les infrastructures de transport et la santé. En effet la RDC présente un intérêt géopolitique pour l’UE, de part sa richesse (diamants, métaux rares, bois précieux...). Jean-Pierre Stroobants, souligne dans un article du Monde du 29 novembre, que “un retrait européen laisserait définitivement le champ libre à la Chine qui, après avoir gagné la bataille de l’influence politique, gagnerait celle de l’économie.”
Malgré les efforts et les moyens déployés, des irrégularités et des violences ont été enregistrées le jour du scrutin. La confusion a été du notamment à des problèmes d’organisation du vote comme l’ouverture tardive des bureaux, un nombre insuffisant de bulletins , le secret du vote non garanti dans une province, l’interception de bulletins marqués dans trois provinces. Ceci a découragé certains électeurs qui ont préféré s’abstenir. Néanmoins il est difficile de savoir quelle a été l’ampleur de ces pratiques et dans quelles mesures elles pourraient décrédibiliser les résultats. Le risque est en effet que dans le cas d’une défaite d’Etienne Tshisekedi, scénario très probable, celui-ci contesterait les résultats car il s’est d’ailleurs déjà déclaré gagnant avant même les élections. Cette situation risquerait de dégénérer à “l’ivoirienne”. Il y a d’ores et déjà eu des violences, des incendies et des personnes tuées. C’est un scénario que Catherine Ashton, chef de la diplomatie européenne, souhaite éviter. Elle a appelé “ le peuple congolais au calme et à l'apaisement pendant le dépouillement, la compilation et l'annonce des résultats”. Le SEAE suit le dossier attentivement, ils ont passé des messages, mais restent très discrets sur le sujet afin de ne pas compromettre leurs relations avec le président actuel. C’est là tout l’art de la diplomatie!
Nikita Letard
Manon Le Yeuc'h
Sources:
Article Le Monde, 29/11, Jean-Pierre Stroobants "Les aides versées par l'Union Européenne à la RDC font polémique"
Site SEAE: http://eeas.europa.eu/delegations/congo_kinshasa/press_corner/all_news/news/2011/20111010_fr.htm
Déclaration C.Ashton: http://www.consilium.europa.eu/uedocs/cms_data/docs/pressdata/FR/foraff/126425.pdf