Des pratiques commerciales controversées

Temu propose une large gamme de produits : vêtements, jouets, outils ou encore high-tech. Elle base son modèle économique sur des prix très bas, atteignant jusqu’à 90 % de réduction. Cette stratégie repose sur la suppression des intermédiaires. Les autorités européennes s’inquiètent des conséquences de ce modèle.

La Commission européenne soupçonne que Temu enfreint le Digital Services Act (DSA), qui impose des règles strictes aux grandes plateformes numériques. « Nous voulons nous assurer que Temu respecte les normes de l’UE et protège les consommateurs », a déclaré Margrethe Vestager, ancienne commissaire à la au numérique et à la concurrence. L’un des principaux reproches adressés à Temu concerne la vente de produits non conformes aux normes européennes. Selon une enquête réalisée en février 2024 par Toy Industries of Europe, « aucun des jouets achetés sur Temu n’était conforme à la réglementation ». Ces articles bas de gamme peuvent mettent en danger les consommateurs, en particulier les enfants Des associations de consommateurs dénoncent aussi des articles dont les notices ne sont disponibles qu’en chinois ou des produits sans étiquette d’ingrédients. En réponse, Temu affirme avoir « pris des mesures importantes pour garantir la conformité de ses produits », tout en s’engageant à coopérer avec la Commission.

Temu se distingue aussi par un marketing agressif, basé sur des techniques de ludification. Sur son application, les utilisateurs sont attirés par des réductions instantanées, des notifications constantes, et des jeux en ligne offrant des coupons. Les roulettes en pop-up font d’ailleurs pensée à celles que l’on peut voir dans des casinos. « Ces systèmes ludiques influencent indûment les décisions d’achat et nuisent au bien-être mental des utilisateurs », souligne un porte-parole de la Commission européenne. La plateforme cible particulièrement les jeunes, utilisant l’intelligence artificielle pour analyser leurs habitudes, centres d’intérêts et personnaliser ses recommandations.

Temu est également accusée de ne pas respecter les règles européennes en matière de protection des données. Elle aurait utilisé des systèmes de collecte de données de manière intrusive. Une enquête menée par Grizzly Research en 2023 avait révélé que l’application « contenait un logiciel espion caché ». Même si Temu affirme respecter le RGPD et les lois européennes, ces accusations alimentent les doutes.

On associe souvent la plateforme à la fast fashion et à la surconsommation. Ses prix extrêmement bas incitent à des achats massifs et augmentent les déchets et l’empreinte écologique. De plus, plusieurs rapports, notamment du Congrès américain, accusent certains fournisseurs de la plateforme de recourir au travail forcé des Ouïghours. Temu a démenti en affirmant interdire « strictement l’utilisation de main-d’œuvre involontaire ». Le contraire n’a cependant pas été prouvé à ce jour.

Des sanctions possibles

L’enquête de la Commission pourrait aboutir à des sanctions sévères. Temu pourrait risquer une amende pouvant atteindre 6 % de son chiffre d’affaires mondial. Cela représenterait plusieurs milliards d’euros. L’Union européenne pourrait imposer des mesures correctives strictes pour améliorer la transparence et la sécurité des consommateurs. Temu, consciente des enjeux, a déclaré prendre « très au sérieux ses obligations en vertu du DSA ». La plateforme s’est engagée à renforcer ses procédures et à coopérer pleinement avec les régulateurs.

Cette enquête marque un tournant dans la régulation des grandes plateformes numériques en Europe. Elle souligne la volonté de l’Union européenne de protéger ses citoyens face aux pratiques commerciales douteuses. Pour la Commission, il s’agit aussi d’assurer une concurrence équitable et de garantir que les marketplaces étrangères respectent les normes européennes. Avec l’arrivé de Haul, l’équivalent de Temu créé par Amazon, il est important de prendre des mesures pour protéger les consommateurs européens face à ces pratiques. Si les accusations sont confirmées, cette affaire pourrait aussi changer le fonctionnement de plateformes similaires comme Shein ou Ali Express.

Sources :

AFP. Temu. C’est quoi ce nouveau site chinois qui concurrence AliExpress, Wish et Shein ? Ouest-France.fr. https://www.ouest-france.fr/economie/consommation/temu-cest-quoi-ce-nouveau-site-chinois-qui-concurrence-aliexpress-wish-et-shein-1a8811de-0451-11ee-991f-2782abd6e672

AFP. Enquête contre Temu, soupçonné de vendre des produits illégaux et dangereux. (2024, octobre 31). 20 Minutes. https://www.20minutes.fr/societe/4119030-20241031-bruxelles-ouvre-enquete-contre-site-temu-soupconne-vendre-produits-illegaux-dangereux

Commission européenne. La Commission et les autorités nationales appellent Temu à respecter la législation européenne en matière de protection des consommateurs—Commission européenne. (s. d.). Consulté 19 novembre 2024, à l’adresse https://france.representation.ec.europa.eu/informations/la-commission-et-les-autorites-nationales-appellent-temu-respecter-la-legislation-europeenne-en-2024-11-08_fr

Commission européenne. La Commission ouvre une procédure formelle à l’encontre de Temu au titre de la législation sur les services numériques—Commission européenne. (s. d.). Consulté 19 novembre 2024, à l’adresse https://france.representation.ec.europa.eu/informations/la-commission-ouvre-une-procedure-formelle-lencontre-de-temu-au-titre-de-la-legislation-sur-les-2024-10-31_fr

Gkritsi, E. (2024, octobre 31). La Commission européenne ouvre une enquête formelle à l’encontre de Temu. www.euractiv.fr. https://www.euractiv.fr/section/plateformes/news/la-commission-europeenne-ouvre-une-enquete-formelle-a-lencontre-de-temu/



LIBERATION, & AFP. (s. d.). L’Union européenne ouvre une enquête contre Temu, soupçonné de vendre des produits illégaux ou dangereux. Libération. Consulté 19 novembre 2024, à l’adresse https://www.liberation.fr/international/europe/lunion-europeenne-ouvre-une-enquete-contre-temu-soupconne-de-vendre-des-produits-illegaux-ou-dangereux-20241031_G6ACXA2RMBFTBMHOIMZMJCV3OQ/

Vallet C. Pourquoi la Commission européenne ouvre une enquête contre Temu, plateforme chinoise de commerce en ligne. Lemonde.fr (2024, octobre 31). https://www.lemonde.fr/economie/article/2024/10/31/pourquoi-la-commission-europeenne-ouvre-une-enquete-contre-temu-plateforme-chinoise-de-commerce-en-ligne_6369455_3234.html