L’Italie gagne en influence au sein de l’Union européenne, cela se traduit notamment par la nomination de Raffaele Fitto, ancien ministre italien des Affaires européennes et membre du parti de Meloni Fratelli d’Italia, comme un des nouveaux vice-présidents exécutifs de la Commission européenne chargé de la Cohésion et des Réformes. Néanmoins, son approbation par les eurodéputés ne fait pas l’unanimité en Italie. L’allié du parti de la Première Ministre, Matteo Salvini, leader des Patriotes pour l’Europe de la Lega, a appuyé le succès du nouveau commissaire, en confirmant qu’il n’appuiera pas la nouvelle Commission. En outre, le porte-parole du Partito Democratico, qui représentent les socialistes et démocrates européens, Peppe Provenzano, se montre plus prudent. Il expose que la Commission nouvellement nommée aurait autant de mal à combler les déficiences politiques que la Commission sortante et met en lumière l’écart entre les déclarations de Raffaele Fitto lors de son audition de confirmation et les décisions prises par Giorgio Meloni à l’échelle nationale. Ses opposants contestent aussi ses racines d’extrême droite qu’il omet d’évoquer lors de son audition par le Parlement, revendiquant ses origines du parti centriste Democrazia Critstiana.

L’Italie est aussi cheffe de file en ce qui concerne l’immigration, qui est priorisée par la première ministre italienne. La réforme du Pacte sur l’asile et l’immigration mis en œuvre à partir de la fin de l’année 2023 en est un bon exemple, l’Italie en est l’un des principaux instigateurs. Il a pour principe de prévoir une solidarité entre les Etats-membres pour se répartir les demandeurs d’asile. Ce Pacte met aussi en œuvre un contrôle renforcé aux frontières ainsi qu’une procédure accélérée pour les ressortissants de certains pays. En parallèle, Giorgia Meloni coopère bilatéralement avec d’autres pays tiers hors de l’Union européenne comme l’Albanie ou la Tunisie, cela pose la question de la valeur des règlements de l’Union européenne. De plus, il n’y aucune garantie du respect des droits de l’homme dans l’établissement de ces accords migratoires. Cette vision est assez paradoxale car le gouvernement italien a besoin de cette immigration du fait de la baisse de la natalité italienne et donc d’un fort déclin démographique. La promesse de Meloni de ne plus accueillir aucun migrants est irréalisable de par les besoins démographiques et de main d'œuvre en Italie.

Du fait de la place grandissante que prend l’Italie, le Premier Ministre Français Michel Barnier tente de renouer un dialogue qui était très compliqué ces dix dernières années, en organisant les 5 et 6 décembre prochains une rencontre bilatérale à Rome comme première visite officielle. En effet, le président du Mouvement M5S Luigi Di Maio, parti populiste de gauche, avait ouvertement soutenu le mouvement des gilets jaunes en France, ce qui avait été très mal perçu par le gouvernement français. En retour, le gouvernement italien accuse Paris d’avoir permis l’arrivée de réfugiés provenant de Libye suite à l’assassinat de Kadhafi et à la faillite de l’Etat Libyen. Cette visite de “courtoisie” de l’ancien commissaire européen, Michel Barnier, a pour objectif de rétablir les relations diplomatiques amicales entre les deux Etats.

Cette initiative se fait aussi dans un contexte d’affaiblissement du couple franco-allemand avec un Emmanuel Macron désavoué, où le gouvernement Barnier est menacé et peut vaciller à tout moment et le premier ministre allemand Olaf Scholz qui peut faire face à un nouvel affront lors des élections anticipées. Le Français et l’Allemand ne s’entendent pas sur tous les dossiers, notamment sur la défense et le nucléaire. Le “couple franco-allemand” est plutôt considéré comme des relations assez étroites entre les deux états mais établies avec beaucoup de difficultés. Pour le chef du gouvernement français, cela paraît évident de se rapprocher de l’Italie où la “stabilité politique est norme”. L’Italie constitue la 3e plus grosse économie européenne, cela paraît assez naturel d’ouvrir les discussions. Le fait d’avoir construit de fortes relations avec l’Allemagne a éloigné Rome et Madrid, ce qui représente une erreur pour Monsieur Barnier.

Sources :

- La confirmation de Rafaelle Fitto à la Commission divise les partis italiens; Euractiv https://www.euractiv.fr/section/commission-europeenne/news/la-confirmation-de-raffaele-fitto-a-la-commission-europeenne-divise-les-partis-italiens/

- Michel Barnier se tourne vers l'Italie alors que le coupe franco-allemand bat de l'aile; Euractiv https://www.euractiv.fr/section/politique/news/michel-barnier-se-tourne-vers-litalie-alors-que-le-couple-franco-allemand-bat-de-laile/

- Pour Michel Barnier, le couple franco-allemand est appelé à devenir un ménage à trois avec l'Italie; Euractiv https://www.euractiv.fr/section/politique/news/pour-michel-barnier-le-couple-franco-allemand-est-appele-a-devenir-un-menage-a-trois-avec-litalie/

- Italie: les paradoxes de la politique migratoire de Gorgia Meloni; Public Sénat https://www.publicsenat.fr/actualites/international/italie-les-paradoxes-de-la-politique-migratoire-de-giorgia-meloni

- Rafaelle Fitto évite les questions des eurodéputés sur son affiliation politique et tente de rassurer; Euractiv

https://www.euractiv.fr/section/economie/news/raffaele-fitto-evite-les-questions-des-eurodeputes-sur-son-affiliation-politique-et-tente-de-rassurer/