Retrait de forces américaines en Roumanie : quid du message envoyé à Poutine ?
Ce 29 octobre 2025, le ministre de la défense roumain Inout Mosteanu a annoncé le retrait d’une partie des forces américaines déployée sur son sol. Une action forte de sens, décidée par le Pentagon en février, dans le cadre d’une réorganisation des priorités américaines vers l’Indo-Pacifique qui s’accompagne d’une baisse des moyens financiers allouées à la coopération militaire avec les Etats baltes.
Un signal d’alerte pour l’Europe
Toujours d’après Mosteanu, ce retrait attendu ne représente que 800 hommes et résulte de la suspension d’une rotation de la brigade américaine présente dans différents pays d’Europe de l’Est – Bulgarie, Roumanie, Slovaquie et Hongrie. Ainsi, ce serait quelques 1 000 soldats qui resteraient sur le flanc Est de l’OTAN. Pas d’inquiétude sur l’engagement des Etats-Unis quant à la sécurité régionale, ces soldats poursuivent leur mission de dissuasion militaire via les bases aériennes de Campia Turzii et de Mihail Kogălniceanu et le système de défense anti-missile de Deveselu. Par ailleurs, les Américains rappellent leur attachement au principe de solidarité en cas d'attaque armée (article 5 du Traité de l’Atlantique Nord).
Cependant, cette réassurance ne parvient pas à effacer les retombées stratégiques d’une telle annonce. En effet, la présence américaine sert de gage concret de l’application de l’article par Washington. Bien que cette protection demeure, ce retrait symbolise malgré tout un affaiblissement visible de celui-ci et de la réactivité. Il fait aussi peser sur les pays européens de l’OTAN une pression accrue et les teste sur leur capacité de coopération. Un joli mouvement politique de la part de Trump alors que ce dernier ne cesse d’appeler les Européens à assumer davantage leur propre sécurité (dépense militaire, capacités logistiques, technologiques et humaines, rapidité de déploiement…).
Quelles réponses de l’UE face à cette annonce ?
En réaction, Kaja Kallas, cheffe de la diplomatie européenne, a enjoint les pays européens à augmenter les budgets de défense afin de partager la charge avec les Etats-Unis tout en martelant l’importance de “bâtir notre propre défense”. Cependant, il faut rappeler que l’Europe, particulièrement l'OTAN, n'est pas dépourvue de moyens pour assurer sa défense. Depuis le sommet de Varsovie de 2016, l’OTAN s’est doté de deux dispositifs complémentaires au principe de solidarité de l’article 5 : le EFP (Enhance Forward Presence) et le TFP (Tailored Forward Presence). Ils se composent de bataillons multinationaux tournant entre les pays baltes avec un objectif clair : “démontrer la solidarité des pays de l’Alliance, ainsi que leur détermination et leur aptitude à réagir en déclenchant une réponse alliée immédiate face à toute agression”.
Il faut bien comprendre, que si le retrait des Etats-Unis bouleverse un équilibre appartenant désormais au passé, l’OTAN au travers des forces américaines restant ainsi que des forces des pays européens maintient une constante présence terrestre, aérienne et navale sur les flancs Est de l’Europe. D’autre part, l’OTAN ne cesse d’augmenter ses capacités cyber, donc la surveillance et le renseignement partagé entre les alliés. Enfin, elle multiplie les exercices sur terrain de grande ampleur, en témoigne l’exercice transeuropéen Dacian Fall qui se déroulait en Roumanie du 20 octobre au 13 novembre 2025. A lui seul, il a réunit plus de 5 000 militaires et 1 200 moyens techniques pour ce qui est l’étape finale du processus de montée en puissance des capacités des “battles groups” – unités multinationales de combat déployées en permanence au sein de pays alliés frontaliers de la Russie – de l’OTAN en Roumanie et Bulgarie.
En définitif, quel message envoyé à Poutine ?
Bien que les Etats européens aient renforcé leur présence sur le flanc Est, le retrait des forces américaines renvoie un message à double lecture. D’un côté, l’Europe peut le percevoir tant comme un désengagement américain sur les questions de défense européenne que comme une opportunité de réaffirmer sa puissance et son esprit de coopération. De l’autre côté, la Russie peut voir ce retrait comme un désengagement américain progressif à même de faire émerger les fragilités internes de l’OTAN, lui offrant alors une fenêtre d'opportunité. Les retombées de cette déclaration demeurent donc encore incertaines et des questions restent à élucider, comme celle du survol des drones russes encore non commentée par les Etats-Unis et la Russie ou l’adhésion de l’Ukraine à l’UE.
Bibliographie :
Retrait de soldats américains : quid du flanc Est de l’OTAN ?, https://www.eurotopics.net/fr/347671/retrait-de-soldats-americains-quid-du-flanc-est-de-l-otan.
En Roumanie, Mark Rutte minimise l’impact du retrait des troupes américaines | Euronews, https://fr.euronews.com/my-europe/2025/11/05/en-roumanie-mark-rutte-minimise-limpact-du-retrait-des-troupes-americaines.
Les Etats-Unis vont réduire leur présence militaire en Europe, annonce la Roumanie, https://www.franceinfo.fr/monde/otan/les-etats-unis-vont-reduire-leur-presence-militaire-en-europe-annonce-la-roumanie_7582403.html.